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mercredi 15 janvier 2020

Petit courrier destiné à un grand journaliste économique

14 janvier 2020

J'écoute la matinale de France Inter. Si, si, j'écoute souvent la matinale de cette radio publique (après avoir visionné les rediffusions des journaux du soir des télévisions de l'Outre-mer, relayées par France Ô). Je vous ai déjà avoué une certaine appétence pour les "papiers" de Sophia Aram, le lundi. Et c'est là que je retirerais volontiers l'épithète quelque peu ironique dont j'affublais naguère cette radio, que j'ai longtemps qualifiée de... "gouvernementale". Mais j'avais quelque raison de traiter ainsi cette radio publique, quand on se souvient des chroniques plus que convenues de ce pseudo-expert qu'était Bernard Guetta (imparfait de rigueur !), lequel Guetta s'est recyclé comme... député européen au sein du parti du monarque élu en mai 2017. Et il y en a qui ont dû faire semblant de paraître surpris !

Des années durant lesquelles Guetta nous a fait du Michel Droit ! Vous voyez bien qu'il m'arrive d'avoir du flair !

Mais j'évoquais tantôt mon intention de retirer cette épithète infamante de "gouvernementale", précisément après avoir entendu Sophia Aram se fendre d'une lettre ouverte à l'attention du ci-devant ministre de l'Intérieur.

Entre nous, j'imagine que feu Michel Droit a dû se retourner dans sa tombe en constatant que la subversion avait envahi ce fleuron de la flagornerie que fut longtemps France Inter, notamment au "bon vieux temps" où un certain Général squattait l'Élysée.

Le nom de Michel Droit ne vous dit rien ? Allez donc faire une petite recherche dans les archives de l'INA (Institut National de l'Audiovisuel), section radio, et vous tomberez inévitablement sur telle interview de Charles de Gaulle par cet illustre cireur de pompes qu'était M. D.

Mais que vient faire Sophia Aram dans l'histoire ? Ben, c'est tout simple. J'imagine une telle chronique sur France Inter, disons dans les années d'activité de Michel Droit, avec Alain Peyrefitte ministre de ci, Michel Debré ministre de ça, voire premier ministre, Pierre Messmer autre ministre de ça, Jacqueline Baudrier présidente de la radio publique, etc.

Elle en a de la chance, Sophia Aram ! Et si vous voulez vous plier en deux de rire, comme je l'ai fait l'autre lundi, en écoutant Sophia Aram, ben, vous n'avez qu'à aller visiter le podcast de la fameuse radio publique !

Mais mon intention première ne visait pas Sophia Aram, mais un autre intervenant sur la fameuse matinale de France Inter, j'ai nommé le sémillant journaliste économique Dominique Seux, que j'ai entendu ironiser, lui aussi, sur le prétendu naufrage que Marine Le Pen aurait connu lors d'un fameux débat d'entre les deux tours de la présidentielle de 2017.

Le fait est que je ne suis pas un fan du Rassemblement National ni de Marine Le Pen, ce qui ne m'interdit nullement d'observer ce mouvement et sa présidente avec un maximum d'objectivité.

Et je maintiens ici que, sur un plan strictement factuel, le programme présidentiel de Marine Le Pen était, et de loin, le document le mieux ficelé car réalisé par des professionnels, là où à peu près tous les autres documents, notamment celui du futur président, semblaient avoir été concoctés par des collégiens en stage de traitement de textes durant la semaine de la presse ! (voyez les archives du blog)

Et puis, il y avait le contenu, l'adhésion franche de Marine Le Pen au referendum d'initiative populaire ayant totalement éclipsé le blablabli-blablabla de tous les autres programmes et ayant, à elle seule, expliqué sa présence au second tour de la présidentielle ; c'est mon avis et je le partage !

Arrive ce fameux débat, dont on nous dit un peu partout que Le Pen l'aurait raté, sans jamais fournir le moindre commencement d'argumentation. Elle l'a raté ? Peut-être, mais à quel moment, et en disant quoi ? On ne sait pas !

Ce fameux débat, je l'ai analysé ici même, notamment cette première demi-heure où il fut abondamment question d'Alstom et de General Electric. Et là, ô surprise, les mêmes (journalistes) qui se gaussent sur un prétendu ratage de Marine Le Pen affichent une discrétion de Sioux à propos des licenciements annoncés dernièrement à Belfort, de même qu'ils rasent les murs à l'idée de l'évocation de telle ou telle commission d'enquête parlementaire suscitée par de sérieux doutes sur la régularité de la vente d'Alstom-Énergie à l'américain General Electric. Certains parlent même d'un scandale dans lequel serait mêlé un des participants à ce fameux débat d'entre les deux tours.

Voilà, donc, que ce "grand" journaliste économique qu'est Dominique Seux y va de son réquisitoire sans preuve ni argumentation sur le prétendu naufrage en direct de Marine Le Pen, et cela ne pouvait que m'inciter à lui adresser les trois messages qui suivent (à lire dans l'ordre chronologique inverse). 
Du coup, je suis allé jeter un oeil sur le "papier" que j'ai consacré à ce débat ici même.

7800 mots, 44000 signes et espaces, soit plus de vingt pages standard de 2000 signes.

Et comme je l'annonçais à notre "grand" journaliste économique, hormis le titre, quelque peu excessif, je ne trouve strictement rien à redire à ce papier.

Ce fameux débat de 2017 a vu s'opposer une Marine Le Pen étonnante de naturel, à qui on est allé jusqu'à reprocher la pile de dossiers étalés devant elle. Ceux-là n'ont jamais assisté à une audience juridictionnelle, avec avocats et greffiers croûlant sous les piles de dossiers de toutes les couleurs. Du coup, ils ont oublié que Marine Le Pen était avocate de formation !

 

Ce soir-là, Le Pen s'est retrouvée devant un comédien qui avait été scrupuleusement "coaché" par des experts en communication ; ça se voyait comme le nez au milieu de la figure.

Mais l'essentiel est ailleurs : depuis deux ans et demi, la France populaire est dans la rue ; on a vu les retraités battre le pavé six ou sept fois, eux qui ne manifestent presque jamais. Et on a eu les Gilets Jaunes, les personnels de santé, jusqu'à des professeurs de médecine menaçant de démissionner, avocats, danseurs de l'Opéra de Paris, enseignants, cheminots..., sans oublier les Outre-mer, terres de résistance et de jacqueries.

Et comme j'adore me citer, voici en quels termes je concluais le long papier que j'avais accordé à ce fameux débat :
Alors, il se peut fort bien qu'Emmanuel Macron soit élu tantôt président de la République française, mais je suis prêt à parier qu'il va, alors, se retrouver dans le même état d'esprit qu'un certain Rosberg au soir de sa victoire en championnat du monde de F1.
 Quant à Monsieur Dominique Seux, on l'invite instamment à s'intéresser d'un peu plus près au sort des personnels menacés de licenciement à Belfort, ainsi qu'à la vente controversée d'Alstom  Energie à General Electric, au lieu de donner dans le blablabli-blablabla un peu facile de la volaille "moutonnière" censée faire l'opinion ? 

On résume ?

Qu'il s'agisse de Dominique Seux ou de n'importe quelle "grande" figure de la presse, je défie quiconque de nous fournir une analyse méthodique et argumentée du prétendu naufrage de Marine Le Pen au cours de ce fameux débat de 2017. Vous avez vu comment je travaille, je veux dire comment un quidam sachant analyser un texte travaille ? On fait faire ça à des élèves de Première ou de Terminale, le jour du BAC.

Et quand bien même Le Pen aurait été "nulle en économie", De Gaulle et Mitterrand étaient des férus d'économie ? Et faut-il être ancien banquier d'affaires ou ancien conseiller référendaire à la Cour des Comptes, ou inspecteur des finances pour se porter candidat pour l'Elysée ? 

Pour mémoire, on nous bassine régulièrement avec la présence des économistes parmi les dédicataires du Prix Nobel, aux côtés de la Chimie, de la Médecine... Le problème est que l'économie est tout sauf une science, ce terme devant être réservé à l'étude des lois naturelles, lesquelles sont intangibles sur des milliards d'années (*), tout le contraire des digressions de l'économie, cette dernière relèvant plutôt du contrat social. C'est dire si elle repose sur des principes hautement fluctuants, dans le temps et dans l'espace.

Citation
(M. Le Pen) Et puis, somme toute, les Français ont aussi pu voir le vrai Macron, dans ce second tour : la bienveillance a fait place à la médisance ; la stratégie marketing a été reprise en main par la machine du PS et puis le sourire étudié se transforme en rictus au fur et à mesure des meetings ; l’enfant chéri du système et des élites, en réalité a tombé le masque, monsieur Macron, voilà. C’est bien, je trouve que c’est utile...
Mais Le Pen ménage ses effets, réservant l'attaque la plus virulente pour la fin, et la troisième personne du singulier fait place à l'apostrophe, au "vous". Du grand art ! (cf. lien n° 1 ci-dessous)

Fin de citation

Par parenthèse, vous aurez observé que tous nos "grands" journalistes sont tombés à bras raccourcis sur Le Pen, mais aucun(e) n'a osé affirmer que l'adversaire de Le Pen, ce soir-là, ait dominé l'affrontement ! En somme, Le Pen a perdu la bataille, mais on ne sait pas contre qui ; en tout cas, on se garde bien d'encenser son adversaire ! L'art de dire, sans dire, tout en disant... Voyez ma série sur la sémantique de la désinformation.

Dernier petit rappel : au second tour de la présidentielle, Le Pen a vu son score presque doubler entre les deux tours, ce qui traduit tout le contraire d'un effondrement ; comme quoi...; et, par ailleurs, aux dernières élections en date (Européennes, 2019), le Rassemblement National a réalisé quelques scores édifiants ici ou là, je pense à ce carton plein dans la totalité des circonscriptions de la... Réunion, le RN s'étant classé premier parti de France aux européennes, et ce, malgré le prétendu ratage intervenu deux ans plus tôt. Autant dire qu'en termes de "ratage", je connais bien des partis politiques, en ce moment-même, qui aimeraient se planter aussi bien ou aussi mal que le parti lepéniste ! (source)

Entre nous, le rappel incessant à ce débat, que Le Pen aurait raté en 2017, ne ressemblerait-il pas de plus en plus à un disque rayé, quand on voit dans quel état de delirium tremens la France se trouve en ce moment, sans que Le Pen y soit pour quoi que ce soit ?

La corporation des journalistes serait bien inspirée de sortir de la litanie moutonnière dans laquelle elle se complaît depuis trop longtemps, avec cette propension à ânonner les mêmes "éléments de langage", ainsi que le confirment moult sondages récurrents en matière (de perte) de crédibilité de la presse. (source) 


(*) Prenez, au hasard,  le génial paradoxe de Blaise Pascal : "Les liquides (fluides) pèsent selon leur hauteur.". Ça fait des milliards d'années que ça dure, et ça va durer encore quelques milliards d'années  ; rien de tel en économie ! 



Liens : 01 - 02 - 03 - 04 - 05 - 06 - 07 - 08 - 09 


mardi 7 janvier 2020

Réflexion sur une forme d'amnésie collective

Memento ("je me souviens")

Documentaliste de formation (entre autres métiers pratiqués) dans une vie antérieure, mais surtout collectionneur compulsif de toutes sortes de documents, et ce, depuis ma plus tendre enfance, je vous avoue avoir du mal à jeter du papier. Donc, je stocke livres, disques, DVD, journaux, magazines, ordinateurs, instruments de musique..., au point de devoir doubler la surface de mon logement tous les dix ans à peu près, pour cause d'encombrement !

Avril 2017, un marché de la banlieue parisienne, des distributeurs de tracts. On est en pleine campagne pour l'élection présidentielle. Rentré chez moi, je scanne le tract et l'archive sur un disque dur amovible. Vous trouverez mon analyse de cette campagne électorale dans les archives de ce blog. Lisez notamment ce que je dis de ce fameux débat d'entre les deux tours, où il fut abondamment question de... General Electric, vous savez ?, ceux qui sont en train de licencier à Belfort !

En ces temps de blablabli-blablabla généralisé, où à peu près tout le monde semble frappé d'amnésie (ce à quoi je ne crois pas une seconde, ne connaissant que trop bien la propension au cynisme des politiciens et autres politicards), il m'a semblé utile de ressusciter cette archive pas si vieille que ça.

Pour le reste, no comment.


 



Lectures : 01 - 02 - 03 - 04


jeudi 27 juin 2019

Gilets jaunes, colère noire et volée de bois vert #25



Épisode §25. La première victoire politique des Gilets Jaunes...

... et le triomphe du téléphone arabe 2.0

"Un mouvement peu structuré, sans leaders officiels ou affirmés, sans ligne directrice affichée...", ainsi fut catalogué le mouvement dit des Gilets Jaunes, sous-entendu : "Ah, si seulement ces GJ voulaient bien fonctionner à l'ancienne, avec tout le fatras administratif des président, vice-président, secrétaire général, etc., c'est fou ce qu'on y verrait plus clair dans leurs intentions. Tandis que là, quel foutoir !".

Il se trouve simplement que ce "foutoir" a joué un rôle non négligeable dans la tournure française des dernières élections européennes, et je m'étonne - enfin, on se comprend ! - de la discrétion de Sioux affichée par nos politologues, profs à Science Po' et autres politocrates en la matière. Rendez-vous compte : ce pays - la France - habitué à pondre une dizaine de sondages politiques par semaine, n'a toujours pas trouvé le temps d'analyser par le menu les raisons de l'échec - que dis-je ! - du fiasco de la liste soutenue par le roi, pardon !, par le président de la République. 

Ce dernier s'est pourtant copieusement démené, allant jusqu'à nous promettre, croix de bois, croix de fer (si je mens je vais en enfer !), qu'il n'était pas question que le Rassemblement National vire en tête au soir de ces élections européennes.
Et qu'a-t-on vu ? Enfer et damnation ! Stupeur et consternation ! Le Rassemblement National vire bel et bien en tête des élections pour le Parlement Européen !

Curieusement, du côté de la presse dite "mainstream", c'est tout juste si l'on a noté la déroute du clan présidentiel, préférant se focaliser sur Les Insoumis ou Les Républicains. Flagornerie quand tu nous tiens !

Et comme, visiblement, nos éminents politocrates ont la mémoire courte, appliquons-nous à la leur rafraîchir.

 

Citation : 
A neuf jours des élections européennes, Emmanuel Macron s'attaque de nouveau frontalement au Rassemblement national. Le RN, "ce sont les sortants. Qu'ont fait les sortants? Ils ont voté contre tous les projets que la France a défendus en Europe y compris pour nous protéger", a dénoncé vendredi le chef de l'Etat face à des journalistes, lors d'un déplacement à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), consacré à la préparation du sommet du G7 que la station balnéaire basque accueillera du 24 au 26 août.
(...)
Le chef de l'Etat a assuré qu'il allait continuer à s'exprimer sur l'Europe d'ici au 26 mai, mais en indiquant ne pas savoir sous quelle forme (entretien à des journaux, intervention sur des réseaux sociaux...) Ses déclarations ont suscité la colère dans les rangs du Rassemblement national.
(…)
"Emmanuel Macron détourne la fonction présidentielle et en abuse pour se comporter en véritable chef de clan", a immédiatement rétorqué sur Twitter la tête de liste RN Jordan Bardella. Steeve Briois, vice-président du parti a lui fustigé "un chef de gang. Un gang qui a mis la France à feu et à sang", qualifiant le président de "honte". (JDD)
 
"Le RN ce sont les sortants...". Comme dirait l'autre, ça ne s'invente pas, n'est-ce pas !?!?!

Rappelons simplement qu'il s'agissait d'élections au Parlement Européen, instance au sein de laquelle la majorité sortante était essentiellement constituée autour du PPE et des Socio-démocrates européens. Autant dire que la formule "Le RN ce sont les sortants" est une totale ineptie !

Constatons, par ailleurs, que les présidents français s'étaient toujours appliqués à ne pas parler de politique intérieure lors de déplacements à l'étranger, tradition qui semble avoir fait long feu...



"Le président de la République lors de sa conférence de presse à Sibiu, en Roumanie, le 9 mai 2019."

Observons simplement que toute cette fébrilité n'a pas fait tiquer grand monde, ce qui ne peut que rehausser l'originalité de l'analyse qui suit.
Elections européennes : "En mettant tout son poids dans la balance, Emmanuel Macron fait un cadeau à Marine Le Pen"

Ce samedi, Catherine Nay décrypte la stratégie d'Emmanuel Macron pour battre le Rassemblement national lors des élections européennes.

Les élections européennes, c'est dans 15 jours. Le Président Macron a profité du sommet européen de Sibiu, en Roumanie, pour dramatiser les enjeux. Il fera tout, a-t-il dit, pour empêcher le Rassemblement National d'arriver en tête, comme si cette élection se résumait à un duel avec Marine Le Pen. Alors, utile ou dangereux ?

Les deux ! L'heure est en effet à la dramatisation puisque la liste Renaissance, conduite par Nathalie Loiseau, et celle du Rassemblement National sont à égalité. 22% des intentions de vote. Pour le Président, l'alternative est claire : est-ce qu'on veut encore construire l'Europe, même différente et en améliorant les choses ? Ou en contraire, déconstruire, détruire, revenir au nationalisme. La question se pose puisque les partis nationalistes européens devraient entrer en force au Parlement de Strasbourg. 180 sièges, soit un quart de l'hémicycle. Une mosaïque d'une très grande complexité. (...)
En mettant tout son poids dans la balance, Emmanuel Macron fait un cadeau à Marine Le Pen. Que dit-elle ? Qu'il transforme ainsi cette élection en référendum pour ou contre lui. Et s'il perd, il devrait avoir la dignité et l'honneur de partir comme De Gaulle. Ce qui n'a aucun sens puisqu'Emmanuel Macron ne partira pas, mais qui est une invite aux opposants de Macron, qui sont nombreux. Elle leur dit : "votez pour moi", elle drague les "gilets jaunes". Il y a 34 listes, ce qui souligne la fracturation du pays.

Les Républicains sont les seuls à faire plus de 10%. Et la France insoumise et Europe Ecologie entre 7 et 10. Mais tous les autres, qui ne feront pas 5%, n'ont aucune chance d'avoir un élu. Donc Marine Le Pen dit à cela : le vote utile, c'est moi, puisque vous êtes tous contre Macron.(Europe 1)


Précisément,  en parcourant les innombrables forums de discussion disponibles en ligne, on sentait bien, du côté des Gilets Jaunes, un flou de moins en moins opaque à mesure qu'approchait le scrutin européen. Bien évidemment, aucune personnalité "emblématique" animant le mouvement n'avait ouvertement annoncé la couleur, hormis le fait qu'il fallait barrer la route à la liste "Macron". On peut passer sous silence les pauvres égarés (Cauchy, Chalençon, Lalanne...) partis s'acoquiner qui avec Dupont-Aignan, qui avec Philippot..., et dont on sentait très bien, en parcourant les forums, que leurs chances de subsister étaient à peu près nulles.

Toujours est-il que la consigne, apparue sur le mode "subliminal", était "Tout sauf Macron", sans autre précision.


Dès février, Eric Drouet avait annoncé qu'il comptait faire "un post [Facebook] ou un sondage [sur les européennes] pour qu'on soit tous raccord. Je n'ai pas d'avis dessus mais il faudra qu'on ait tous le même", estimait-il, avant de poursuivre: "Oui on peut voter ce qu'on veut mais ce serait bien qu'on ne se disperse pas sur les personnes à voter et qu'on donne plus de force contre Macron. Si on peut essayer de s'entendre dessus, on verra."

De son côté, Maxime Nicolle a expliqué dans une longue vidéo en mars sur Facebook Live pourquoi il encourageait les Gilets jaunes à aller voter aux européennes sans appeler à choisir une liste en particulier. "J'appelle à voter personne. Ce n'est pas moi qui vais vous dire : 'votez untel' ou 'ne votez pas untel'. La seule chose que je vous dis c'est : 'Ne votez pas Macron'."

Dans cette vidéo, l'intérimaire breton met en garde les Gilets jaunes sur "l'abstention différentielle", soit la démobilisation d'une partie spécifique de l'électorat permettant à l'autre camp d'obtenir un score plus important que celui des sondages, et souvent de gagner. "L'abstention différentielle, c'est le fait que la classe moyenne inférieure [les Gilets jaunes dans son raisonnement, NDLR] ne s'intéresse pas à cette élection. Donc, il y a un très fort taux d'abstention. En revanche, chez les classes supérieures [qui votent Macron pour Nicolle, NDLR], il y a un taux d'abstention très faible", résume-t-il, à sa façon. (…)
Le chef de l'Etat s'est donné pour objectif d'arriver en tête du scrutin devant le Rassemblement national de Marine Le Pen. Autre figure des Gilets jaunes, Jérôme Rodrigues est conscient de cet enjeu : "J'appelle aujourd'hui aux européennes à faire un vote anti-Macron, quitte à ce qu'il finisse deuxième, qu'il redescende un petit peu d'un étage, qu'il redevienne un petit peu terre à terre et qu'il vienne nous servir nous plutôt que les plus riches", a déclaré Jérôme Rodrigues, samedi à Lyon avant le départ de la manifestation des Gilets jaunes. (JDD)

Comme il fallait s'y attendre, à la suite du scrutin européen, on a eu droit aux commentaires de ceux qui faisaient mine de croire à la légitimité des listes "jaunes" tout en insistant sur la déroute du mouvement.


Le mouvement était déjà à la peine lors des derniers samedis de mobilisation. Mais les gilets jaunes n'ont pas non plus séduit dans les urnes, dimanche. Assiste-t-on à la fin du mouvement social ?

Les élections européennes auront-elles eu raison des gilets jaunes ? Alors que l'essoufflement de la mobilisation grandit de samedi en samedi, les manifestants n'ont pas fait mieux dans les urnes ce dimanche. Avec 0,54% des voix pour l'Alliance jaune du chanteur Francis Lalanne et 0,01% pour sa concurrente Évolution citoyenne, menée par Christophe Chalençon, les deux listes qui se revendiquaient des jaunes arrivent loin du seuil de remboursement de la campagne fixé à 3 %, et encore plus du palier des 5 %, nécessaire pour obtenir un élu. Les gilets jaunes ont-ils pour autant dit leur dernier mot ? Pas si sûr.

Le score d'hier n'est pas un désaveu pour le mouvement, martèlent les têtes d'affiche des manifestants. Et ce car celui-ci a, dans sa majorité, largement critiqué ces listes dès leur lancement. "Certains ont voulu surfer sur la vague jaune, mais il était normal de ne pas participer à ça, on est un mouvement apolitique", commente ainsi auprès de L'Express Jérôme Rodrigues, figure emblématique des gilets jaunes. "Lalanne, je n'ai rien contre lui mais il aurait dû écouter quand on lui disait : 'Les gars ne veulent pas de listes gilets jaunes.'" (L'Express)

"Alors que l'essoufflement de la mobilisation grandit de samedi en samedi, les manifestants n'ont pas fait mieux dans les urnes ce dimanche.", etc. Bel exercice de désinformation dans lequel d'aucuns - titulaires de la carte de presse ! - sont passés maîtres.

Ce qui suit semble un peu plus nuancé. Toujours est-il qu'il est bien plus intéressant de ne jamais parler en lieu et place des intéressés eux-mêmes.


La vague jaune sortie dans les rues n’est pas entrée dans les urnes. Les deux listes issues des Gilets jaunes ont recueilli à peine 1% des suffrages aux élections européennes ce dimanche 27 mai. "Alliance jaune", menée par Francis Lalanne, n’a récolté que 0,5% et "Evolution citoyenne", de Christophe Chalençon, moins de 0,5% des voix.

Une rouste qui ne surprend personne. Encore moins sur Facebook, où la colère s’est cristallisée avant de faire naître la contestation en novembre dernier. Car tout au long de la campagne, les membres des différents groupes de Gilets jaunes n’ont cessé de rappeler qu’aucune des listes ne pouvait se revendiquer du mouvement. Maxime Nicolle, invité sur Sud Radio le soir des élections, a estimé que cette défaite "correspondait avec ce que les manifestants voulaient depuis le début : ne pas être un parti".

C'est pourquoi, chez certains, le bonheur est à son comble. Ramous, l’une des figures des Gilets jaunes sur Facebook, s’est félicité, dans une vidéo vue plus de 68.000 fois en douze heures, du "naufrage" d’Emmanuel Macron. Surexcité, cet ancien chroniqueur de Touche pas à mon poste met un "carton rouge" au chef de l'Etat avec la musique du film Titanic en fond sonore. "On ne fête pas la victoire d’un parti, parce que vous êtes tous les mêmes pourris (…) mais on fête la défaite d’un dictateur", lance-t-il.

Une opinion que partage Laëtitia Dewalle. Proche d’Eric Drouet, cette Gilet jaune médiatisée estime elle aussi qu’on n’en a "rien à faire du premier", et préfère remettre en cause la "légitimité" du président de la République. "Macron a moins d’un votant sur quatre (…) Les urnes ont parlé !", écrit-t-elle sur les réseaux sociaux. (LCI)

Une rouste qui ne surprend personne. Encore moins sur Facebook (...) différents groupes de Gilets jaunes n’ont cessé de rappeler qu’aucune des listes ne pouvait se revendiquer du mouvement. 

Voilà qui a le mérite d'être clair, non ?!

A l'occasion de l'unique tour des élections européennes organisé ce dimanche 26 mai, le Huffingtonpost révèle que de nombreux gilets jaunes ont affiché sur Facebook leur carte d'électeur brûlée ou tamponnée. 

Premier rendez-vous électoral depuis le début du mouvement des gilets jaunes, le scrutin des Européennes était attendu comme un éventuel couperet pour Emmanuel Macron.

Ce dimanche 26 mai, de nombreux électeurs ayant participé aux rassemblements des gilets jaunes ont souhaité profiter de cette occasion pour exprimer leur mécontentement contre le pouvoir en place. Alors que la participation était en forte hausse à 19 heures (52%) par rapport à 2014 (42,43%), le Huffingtonpost indique que des gilets jaunes, vêtus de leur chasuble, ont fait part de leur motivation de sanctionner la politique d'Emmanuel Macron en publiant sur Facebook leur carte électorale dûment tamponnée. Un acte symbolique qui s'est traduit dans les urnes par le score à 20 heures de la liste LREM menée par Nathalie Loiseau (21,9%). (Actu.Orange.fr)

Et c'est là qu'on aurait aimé entendre ou lire les analyses de nos experts en sondologie, qui font de la France probablement la plus grande consommatrice de sondages politiques au monde. Quid, en effet, de l'impact des Gilets Jaunes sur le dernier scrutin européen ?  Pour toute réponse, on a eu droit à un 'motus et bouche cousue', tandis que d'aucuns se perdent en conjectures, ou alors, pas vraiment...

À la grande surprise des docteurs en sciences politiques, ces voix se sont évaporées. Perdues dans un grand trou noir. Leur liste, quasi farlelue, n’a obtenu qu’une poignée de suffrages. Et tous les autres ? Comment retrouver leurs traces ?

A priori, contrairement à ce que les gens de la France Insoumise ont espéré, les Indignés du bitume n’ont pas apporté le moindre soutien à leur parti, principal perdant de ce rendez-vous européen. Le score de 6,5% est un échec retentissant pour Jean-Luc Mélenchon. Sa défense rugueuse et radicale des « gilets jaunes », accompagnée par tous les dirigeants de LFI, est visiblement une erreur tactique. Elle a affaibli considérablement son leader pour les années à venir. On peut dire la même chose pour Laurent Wauquiez, lequel est allé jusquà porter lui-même la chasuble des rebelles des ronds-points. Posture étrange pour un représentant du parti de l’ordre et d’une bourgeoisie de province ayant une passion modérée pour les mouvements de rue. En courant, un temps, derrière les « gilets jaunes », le patron de LR s’est mis dans un sale pétrin et pourrait bien payer les pots cassés de cette tactique hasardeuse. (…)
Mais alors, direz-vous, où est donc passé le vote des « gilets jaunes » ? Chez Marine Le Pen, bien sûr. La patronne du Rassemblement National, avec une habileté réelle, ne s’est pas jetée dans les bras des promeneurs hebdomadaires. Elle les a tenus à distance, sans les contrarier, sans les flatter, gardant une stature de représentante de l’ordre républicain. Elle a appliqué le précepte généralement utilisé en amour « Suis-le, il te fuit. Fuis-le, il te suit ». Que représenterait le pourcentage du vote des Gilets jaunes dans le résultat du Rassemblement National ? Deux, trois, voire quatre pour cent ? Impossible de le savoir avec précision tant ces militants du troisième type jouent les électeurs masqués. Une seule certitude : ils ne sont pas rués chez Laurent Wauquiez ou chez Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr, la déroute électorale de ces deux dirigeants ne se réduit pas à cette question, mais il est certain que leur posture de « copains des émeutiers » a effrayé une partie de leurs sympathisants respectifs. LR ou LFI rêvaient d’être une alternative crédible au duel Macron-Le Pen, donc d’eniler le costume de parti de gouvernement. Cette perspective s’éloigne de plus en plus. (NouvelObs)
Ainsi, donc, à en croire certains, les Gilets Jaunes auraient pris fait et cause pour le Rassemblement National. Et c'est aussi mon avis, du moins d'un point de vue purement conjoncturel ou tactique (= dicté par les circonstances du moment). Et si vous me demandez qui serait à l'origine de cette adhésion subite et pas vraiment annoncée auparavant, je vous répondrai sans hésitation : ben, le roi de France, pardon, enfin, je veux dire son Excellence le Président de la République ! Entre nous, je le croyais bien plus intelligent que ça !

Autant dire que le ci-devant Jupiter français s'est tiré là quelques boulets de canon dans le pied, manoeuvrant avec brio de manière à ce que le Rassemblement National sorte gagnant de ce scrutin européen.

En effet, si la consigne de départ était bien "Tout sauf Macron", rien dans les déclarations des Gilets Jaunes "canal historique" ou dans les prises de position au sein des forums de discussion ne permettait de supposer un mouvement massif en faveur de la liste Bardella.

Il se trouve simplement que c'est par son activisme et son omniprésence médiatique que notre Jupiter a fini par cristalliser un mouvement d'opinion en faveur du RN. Et là, Macron ne peut s'en prendre qu'à lui-même, ainsi qu'annoncé plus haut par Catherine Nay : (...) Marine Le Pen dit à cela : le vote utile, c'est moi, puisque vous êtes tous contre Macron. 

De fait, vote utile veut dire que l'électeur ne va pas hésiter à voter, au besoin, contre son camp de prédilection, dès lors que ce dernier n'a aucune chance de battre le parti du monarque. Ce n'est pas forcément un vote d'adhésion, mais à tout le moins, d'opportunité.

Et où nos experts en politologie ou en politocratie, mais aussi les partis politiques en général se doivent d'éplucher scrupuleusement les résultats des dernières élections européennes, c'est notamment dans la concommitance entre progression de la participation depuis les dernières européennes et poussée en faveur du parti de Marine Le Pen.

Un indice intéressant de la chose nous est fourni par La Réunion. Il se trouve que c'est le département ultramarin qui a vu la plus forte mobilisation des Gilets Jaunes. Et, comme par hasard, le Rassemblement National y est arrivé en tête dans toutes les communes, ce qui n'est quand même pas banal, et annonce des élections municipales plutôt rock'n-roll !

En tout cas, Marine Le Pen peut adresser un vibrant "Merci pour ce coup de pouce !" au monarque-président ou président-monarque. Cela dit, si j'avais un conseil à adresser à la présidente du RN, ce serait de ne pas se réjouir trop vite.

En effet, ma conviction est que les Gilets Jaunes ont surtout entendu s'appuyer sur la technique du levier (cf. Archimède), dans la mesure où "Tout sauf Macron" voulait dire que "tout levier susceptible d'entraver la marche en avant de la liste soutenue par le roi, pardon !, par le président, devait être actionné en priorité, dans un souci d'efficacité.". Le fait est que Macron a, lui-même - erreur monumentale ! - , désigné aux Gilets Jaunes le "bon" levier à actionner pour ruiner ses plans : le Rassemblement National. Et c'est là qu'on devrait voir si Marine Le Pen a la stature d'une femme d'Etat - et pas simplement d'une vulgaire aboyeuse abonnée à Twitter ! -, susceptible de lui faire transformer l'essai lors des scrutins futurs, à commencer, par exemple, par le gain de quelques municipalités en Réunion, à Mayotte, en Guyane, et pourquoi pas aussi aux Antilles, ce qui correspondrait à une déflagration nucléaire et sonnerait le commencement du démantèlement dudit "plafond de verre"... !

N'oublions pas qu'il s'est agi, aux dernières européennes, d'un scrutin proportionnel à un seul tour et sur une seule circonscription. Lors des prochaines élections (locales : municipales, départementales, régionales), les forces en présence varieront forcément de circonscription en circonscription, surtout si, comme on peut s'y attendre, les Gilets Jaunes s'engagent, cette fois, dans la bataille électorale, notamment lors des municipales, le scrutin le mieux adapté à un mouvement ouvertement anti-partis politiques.

Pour en revenir à notre sous-titre : Le téléphone arabe 2.0, il se confirme que, décidément, bien des experts de la chose sociale et politique, ceux que j'appelle des politocrates, n'ont toujours pas compris les enjeux du monde moderne, persistant à analyser les faits sociaux à l'aide de leurs vieux instruments éculés (ex. les sondages).

Il se trouve que ces mêmes "experts" n'ont pas vu venir les Gilets Jaunes, tout comme ils se sont appliqués à dévaloriser ce mouvement qui, sans chefs, ne pouvait que péricliter. Mais, des mois après, il n'avait toujours pas périclité. Oui, mais, attendez !, va-t-on nous rétorquer, vous ne voyez pas qu'ils sont de moins en moins nombreux ? Comme si un iceberg se réduisait à sa pointe émergée !

Le fait est que ce mouvement, qui n'attirerait plus grand monde dans la rue, à en croire les gazettes, a été en mesure de faire appliquer avec efficacité une consigne non dite, autant dire du type subliminal, consigne abondamment suivie par tous sous la forme d'une participation accrue des électeurs et de la défaite du clan d'un président qui avait monopolisé les média écrits et audiovisuels comme aucun des ses prédécesseurs, allant même jusqu'à se produire sur Youtube, histoire, paraît-il, de mobiliser les jeunes. On a vu avec quel résultat !



C'est dire si la performance réalisée en coulisses par les Gilets Jaunes - sans avoir l'air d'y toucher - est tout bonnement époustouflante et devrait leur donner des idées pour la suite (cf. élections municipales et ss.). Et tout cela a été rendu possible par l'antique téléphone arabe adossé aux nouvelles technologies de l'information. Et la chose n'a rien d'extraordinaire : voyez tous ces mouvements sociaux en ce moment-même, et sans chefs, au Soudan, en Algérie, au Nicaragua, à Hong-Kong...

Les politologues et autres politocrates vont devoir se faire une raison : les temps changent ! 


Petit supplément illustré

 
 



 

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