mardi 26 avril 2011

À nos ami(e)s de Tunisie et d'Egypte - To our friends in Tunisia and Egypt



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C'est en consultant, tout à fait par hasard, les statistiques des visites de mon blog, ce que je ne fais pas souvent - et que je devrais faire plus fréquemment ! -, que j'ai eu la surprise de constater que j'avais des visiteurs un peu partout dans le monde, et tout particulièrement en Afrique du Nord, notamment en Tunisie, Algérie et Maroc.

Et c'est là que l'on réalise que l'on ne s'est pas beaucoup intéressé au printemps méditerranéen, hormis la question libyenne, qui présentait une toute autre urgence, reconnaissons-le.

Il ne s'agit nullement de négligence de ma part, mais tout simplement de modération et de prudence, histoire de se faire une idée des problèmes avant d'avancer une opinion, contrairement à ce qui se fait un peu trop souvent, de nos jours, notamment sur l'Internet, où les gens se lancent très vite dans des expertises avant d'en savoir un peu plus sur telle ou telle question.

C'est qu'il y aurait énormément de choses à dire sur ce printemps arabe, dites donc ! Mais je vous rassure : j'ai bel et bien l'intention d'en parler, et pas uniquement à propos de la  Libye. Mais, pour l'heure, j'aimerais aller à l'essentiel.

Qu'est-ce que j'aurai envie de dire, là maintenant, à mes frères et soeurs d'Afrique du Nord ?

D'abord, d'avoir une lecture structurelle et non conjoncturelle des choses. La structure, c'est ce qui dure ; la conjoncture, c'est ce qui ne fait que passer.

Autrement dit, il ne faut pas se révolter contre Mubarak, ni contre Ben Ali, pour se retrouver, peu de temps après, avec un autre Mubarak ou un autre Ben Ali.

Souvenez-vous : en 1789, le peuple français se soulève contre la monarchie, sans savoir vraiment dans quel but ? Et très vite, la Révolution bascule dans la violence, ce qui mène, entre autres choses, au meurtre du roi en 1793. Et puis... Et puis ? Une dizaine d'années plus tard, Bonaparte se fait sacrer Empereur des Français et allait entraîner son pays dans un délire guerrier qui allait voir toute l'Europe se liguer contre la France. Je passe sur les innombrables morts et dévastations provoquées par Napoléon aux quatre coins de l'Europe.

Et là, on se dit : tout ça pour ça ? Le fait est que les Français ne connaîtront la République, de façon à peu près stable, qu'en 1875 (la Troisième), et encore ! Entre temps, il y aura eu un autre Napoléon, le Troisième, ou le Petit (dixit Victor Hugo). Mais la République sera de nouveau interrompue (hé oui !) par une parenthèse fascisante en 1940 à la "faveur" d'une occupation militaire par les Nazis. Retour à la République (la 4ème) en 1946. Douze courtes années de démocratie parlementaire, avant que la France ne bascule de nouveau (atavisme oblige !) dans l'autocratie. Tout ça pour ça !

Ce que je veux dire par-là, c'est que nous devons tirer des leçons de l'histoire. Le fait est que, depuis les indépendances, l'Afrique traîne des autocrates comme autant de boulets aux pieds. Et, du coup, à quoi bon se soulever contre Bourguiba I, si l'on se retrouve avec Bourguiba II, III, IV ? Cela ne mène qu'à des changements conjoncturels, comme en ce moment-même en Côte d'Ivoire. Ce qu'il faut, c'est changer de régime.

Et c'est là que je me suis fait un petit pari dans ma tête, en me demandant, entre Tunisie et Egypte - les deux premiers pays à avoir provoqué la chute de leurs dirigeants, le tout sans le moindre (enfin, je suppose !) coup d'Etat militaire, je veux dire essentiellement en raison d'une mobilisation du peuple -, lequel sera le tout premier pays africain à opter pour un régime de type PARLEMENTAIRE, après avoir viré le système présidentiel actuel.

Un régime parlementaire, comme les Turcs ont eu la bonne idée d'en instaurer un ! Ça veut dire que le peuple élit ses députés, et au soir du scrutin, la majorité au Parlement désigne un Premier ministre qui va diriger l'exécutif.

EN FINIR DÉFINITIVEMENT AVEC LE BONAPARTISME, INCARNÉ PAR CES CARICATURES AUTOCRATIQUES QUE SONT LES PRÉSIDENTS DE LA RÉPUBLIQUE !

Chers amis égyptiens et tunisiens, faites-nous plaisir, exigez l'élection d'une assemblée constituante, chargée d'élaborer une nouvelle constitution qui serait, ensuite, approuvée ou désapprouvée par le peuple via un referendum. Et là, je vous invite chers amis, à être réellement RÉVOLUTIONNAIRES et instaurant, enfin, le parlementarisme en Afrique.

J'ai longtemps pensé que le Ghana pourrait passer au parlementarisme, ou encore l'Afrique du Sud, ces deux pays étant les plus mûrs intellectuellement pour franchir le pas. Parce que je ne crois pas du tout à la consistance de la démocratie dans un régime où un homme seul décide d'à peu près tout, comme c'est le cas dans tous les systèmes hérités du bonapartisme, ce régime inventé en France (cf. Napoléon Le Petit, alias III), puis réinventé en Amérique du Sud dans moult républiques bananières et réimporté en France en 1958 par un certain général (tiens, tiens !).

Et, comme par hasard, en 1958, Charles de Gaulle n'a rien trouvé de mieux que de tripatouiller la Constitution existante pour la mettre à sa main (tiens, ça ne vous rappelle rien ?), parachevant son coup d'Etat légal en 1962 par l'instauration de l'élection du président de la République au suffrage universel direct.

Et depuis, tous les pays africains ont adopté ce système, qui n'est qu'une antichambre de la dictature, se prêtant effectivement à toutes les manipulations et à tous les tripatouillages.

Le système parlementaire ? C'est l'Inde, avec son 1.2 milliard d'habitants. Mais c'est aussi la Jamaïque. C'est, bien entendu, la totalité des pays de l'Europe communautaire, à l'exception d'un seul, je vous laisse deviner lequel !

Vous savez quoi ? Le dirigeant le plus puissant de l'Europe communautaire est une femme : la chancelière allemande. Il y a bien un président de la République, mais c'est l'Assemblée Nationale (Bundestag) qui détient le pouvoir et qui soutient le chef du gouvernement. Et le jour où ladite assemblée vient à faire défaut au chef du gouvernement, ce dernier tombe. Tout simplement. Voilà qui limite singulièrement les excès de pouvoir.

Prenons les événements récents survenus en Afrique. Imaginez que la Côte d'Ivoire ait opté pour un système constitutionnel de type parlementaire. Au soir de la dernière élection, qui aurait été une élection législative à un tour, les camps se seraient comptés et des regroupements se seraient  faits. Un camp majoritaire (au Parlement) se serait dégagé (disons entre Bédié et Ouattara) et aurait désigné son premier ministre, qui se serait appelé Ouattara ou Bédié, par exemple, à moins que d'autres alliances ne soient apparues autour de Gbagbo. Et le jour même de la proclamation des élections législatives, la Côte d'Ivoire avait un gouvernement opérationnel. Et, dans ce cas, est-ce que vous auriez eu la pantalonnade meurtrière des derniers mois ?

Parce que s'il y a une chose que, personnellement, je reproche  à l'intelligentsia ivoirienne en particulier, et africaine en général, c'est bien cette indigence intellectuelle qui les rend incapables d'innover en quoi que ce soit, se contentant de singer bêtement tout ce qui vient de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Il est vrai que beaucoup d'entre eux et elles ont fait des études dans les universités européennes et nord-américaines, d'où cette propension à la clownerie et à l'imitation ridicule !

Oui, mais, me direz-vous, comment expliquer que le modèle parlementariste du type britannique, ou allemand, ou suisse, ou indien, ou turc..., ait si peu déteint sur nos pays de l'hémisphère sud ? 

Ça c'est une bonne question. Et il y a sûrement une explication. Voyez le continent sud-américain, où les régimes parlementaires - j'évoquais la Jamaïque - se comptent sur les doigts de la main. Une sorte d'atavisme autocratique difficile à éliminer et hérité de quelques grandes figures tutélaires : les Bolívar, Sandino, Perón..., jusqu'aux Videla, Viola, Banzer, Pinochet, voire Castro..., bref, des "sauveurs de la nation", des "petits pères des peuples", comme en Afrique, nous avons eu les Nasser, Jomo Kenyata, Nyerere,  Nkrumah, Mobutu, Amin Dada, Houphouet-Boigny, Senghor, etc.

Cela étant, j'oublie un détail important, voire essentiel : la mainmise des colonisateurs sur les affaires intérieures des pays officiellement indépendants, par le biais de comparses sous contrôle, ce qui a consisté en assassinats de démocrates un peu partout (cf. Patrice Lumumba), en installations programmées de dictateurs à la solde de l'impérialisme (cf. Mobutu, Amin Dada, etc., la liste est longue !), et ce, jusqu'à une date récente. Voyez le Cameroun, dans les années 50-60, avec la liquidation méthodique de tous ses démocrates par la France (ex. forêts brûlées au napalm !) - on se demande ce qu'attend la Cour Pénale Internationale pour se pencher sur les crimes contre l'Humanité commis par les Européens dans l'hémisphère sud -, dans le but d'assurer à Ayidjo un pouvoir sans partage ; et voyez, plus récemment (1996-1997), le coup d'Etat effectué par un simple citoyen congolais (Sassou Ngesso) contre le président élu du Congo Brazzaville (Pascal Lissouba), le putchiste s'étant offert une armée privée responsable d'innombrables exactions. Je passe sur tous ces coups d'État militaires qui gangrènent la vie du continent africain depuis des lustres, de l'Algérie à  Madagascar, du Cap-Vert au Mozambique,  et de la Guinée à l'Ethiopie...

Et partout, comme en Côte d'Ivoire, des escouades de soudards armés jusqu'aux dents, donc équipés d'un armement produit, je vous laisse deviner où ! En tout cas, pas en Afrique, ce continent pauvre en médicaments, pauvre en équipements scolaires, pauvre en infrastructures, pauvre en moyens de transport..., mais riche en armes, gracieusement offertes par de bien généreux donateurs !

Mais il y a autre chose : nos pays africains consistent souvent en mosaïques de communautés, surtout ethniques et linguistiques. Ce qui explique les innombrables soubresauts et affrontements survenant régulièrement entre telle ou telle communauté et l'Etat central. Dans ces conditions, pourquoi ne pas s'inspirer de quelque chose qui marche très bien, à savoir la Confédération ? Voyez la Suisse.

En résumé ? Faire partir Ben Ali et Moubarak, c'est bien, mais ce n'est pas l'essentiel. Ce qu'il faudrait, c'est virer définifivement le bonapartisme. Et ça commence par l'instauration d'un régime parlementaire, de type confédéral, avec en outre l'organisation régulière de referendums d'initiative populaire ; par exemple : une loi ne vous  plaît pas ? Vous organisez une pétition, et avec un nombre minimum de signatures, vous déclenchez un referendum pour ou contre la loi. Ce système marche très bien en Suisse, en Californie et ailleurs !


On résume ? Trois choses essentielles :
- parlementarisme ;
- confédéralisme ;
- referendum d'initiative populaire.

Chers amis tunisiens et égyptiens, en ce qui me concerne, les paris sont ouverts : lequel de vos deux pays aura l'intelligence d'être celui qui initiera, en Afrique, le principe de la démocratie authentiquement parlementaire, tout en respectant les minorités ethniques et linguistiques ? 

Wait and See.

Pour ma part, une chose est sûre : reconduire le système bonapartiste actuel, en se contentant d'organiser de nouvelles élections... présidentielles, serait mortel !



Post-Scriptum

Comment ne pas être affligé de voir de jeunes gens prendre le risque insensé de traverser la Méditerranée dans des barques branlantes (je sais, d'autres idiots font la même chose entre la Mauritanie et les Canaries, soit une dizaine de jours de traversée, pour ceux qui arrivent vivants de l'autre côté !), pour venir se faire humilier à Lampedusa ou à Vintimille ? Nous avons des pays gorgés de soleil, avec des plages magnifiques, qui font rêver des dizaines de millions de touristes. Il ne faut pas beaucoup d'argent pour vivre dans ces pays. Juste un peu de courage. Et il y a là des abrutis - parce que ce sont des abrutis - qui ont visiblement trop regardé les feuilletons américains à la télévision, et qui croient que l'Europe, c'est le paradis ! Quels imbéciles !


Vous avez dit imbéciles ?????


Après dix jours de traversée, cet abruti descend à peine d'une pirogue (Canaries) et ne tient même pas debout !
immigrant

senegal

africa


Ci-dessous, marqués d'une croix, ces deux-là n'ont pas plus de quinze ans !

lampedusa





26 avril 2011. France 2, Journal de 20 heures.


Un jardin public à Paris, transformé en dortoir pour migrants illégaux tunisiens. Pas de logement, pas de papiers, pas d'argent, pas de travail, pas de vêtements pour se changer, pas de sanitaires, pas de savon, pas de douches, pas de nourriture... La France, un paradis ? Ils avaient un "chez eux" en Tunisie, ici, ce ne sont plus que des clochards !