vendredi 17 août 2012

Vous reprendrez bien une petite dose de désinformation ? Signée France Inter


Jeudi 16 août 2012. Il est neuf heures ; j'allume ma radio et j'appuie machinalement sur le bouton '1' de la télécommande, celui de France Inter. Une voix annonce le journal de Nicolas Teillard.



Ci-dessous, je retranscris in extenso les deux premiers sujets traités dans ce bulletin d'information, ainsi qu'un bout du troisième thème abordé.

"La Syrie mise au ban du monde musulman alors que les violences se poursuivent dans le pays, Damas a été suspendu de l’Organisation de Coopération Islamique en cause de la répression menée depuis dix-huit mois par le régime syrien, une répression qui a donné lieu à des crimes de guerre selon les Nations Unies ; la commission des droits de l’Homme de l’ONU a rendu son rapport hier ; elle y pointe les nombreuses violations du droit international ; les rebelles ne sont pas en reste d’ailleurs, mais sur l’échelle de l’horreur, les crimes du régime restent bien supérieurs. Le détail avec Perinne Mouterde."

"Tous coupables mais certains bien plus que d’autres selon les enquêteurs des droits de l’Homme de l’ONU : les forces gouvernementales comme les insurgés ont commis des crimes de guerre, mais ils sont plus nombreux et plus variés du côté du régime qui est aussi accusé de crimes contre l’Humanité, les troupes loyales  à Bachar al Assad et ses miliciens, les Chabiyas sont responsables de meurtres, d’actes de torture, d’arrestations arbitraires, de pillages et de destruction s de biens ; surtout les enquêteurs affirment que ces crimes relèvent d’une politique d’Etat, avec des opérations à grande échelle menées dans plusieurs provinces et une implication de l’armée et des services de sécurité du gouvernement au plus haut niveau. Ce rapport confirme par exemple que ces forces ont massacré fin mai à Houla une centaine de civils dont des dizaines d’enfants. Les rebelles sont, eux, accusés d’avoir exécuté des militaires, des miliciens et des informateurs présumés, parfois après des procès sommaires. L’ONU conclut que les deux parties ont recours a des pratiques toujours plus brutales face au camp adverse. Perrine Mouterde, Beyrouth, France Inter."

"Le conflit syrien qui déborde sur les pays voisins, et notamment en Jordanie, où Laurent Fabius débute ce matin sa tournée au Proche-Orient. Le ministre des Affaires Etrangères en visite dans l’un des camps de réfugiés où des milliers de Syriens s’entassent pour fuir les violences. La tension au Proche Orient, elle, se manifeste aussi de plus en plus en Israël. La menace iranienne pourrait conduire l’Etat hébreu à lancer une offensive sur les installations nucléaires de l’Iran, attaques imminentes si l’on en croit certains observateurs, en tout cas les déclarations des dirigeants israéliens se font chaque jour un peu plus fermes et les médias ne cessent d’alimenter les spéculations. À moins de trois mois de l’élection présidentielle américaine, l’éventualité d’une attaque agite aussi la Maison Blanche. Entre Jérusalem et Washington on assiste donc à une véritable partie d’échecs. Danielle Tabor..."

"Un ancien haut responsable du Pentagone affirme que la menace israélienne de lancer une attaque contre l’Iran est réelle. Netanyahu et Barak ne bluffent pas, estime-t-il ; ils sont en train, au contraire, de préparer l’opinion publique à cette éventualité car ils estiment que les sanctions ne serviront à rien. En revanche, le secrétaire américain à la Défense, Léon Panetta, affirme, lui, qu’Israël n’a pas encore pris la décision de lancer ou non des frappes contre l’Iran. Mais côté israélien, la pression s’accentue ; le commandement de la défense passive prépare la population au scénario du pire ; à Tel Aviv soixante parkings souterrains ont été aménagés pour servir d’abris en cas d’attaque de missiles. Le test d’alertes par SMS se poursuit ; le ministre de la défense passive sortant, Nathan Vilnai déclare, je cite : Israël est prêt à affronter un conflit qui pourrait durer trente jours et causer  500 morts.". Jérusalem, Danielle Tabor, France Inter.

Total : 3 minutes 12

Arrive le troisième sujet :

En France, l’actualité marquée une nouvelle fois par le débat sur la sécurité, après les incidents d’Amiens ; cette nuit, cinq personnes ont été interpellées suite aux affrontements des jours derniers entre jeunes et forces de l’ordre… Etc.

Observons, en passant, que sur FRANCE Inter, la principale radio gouvernementale française, des jacqueries urbaines avec tirs d'armes à feu sur des policiers, en terre française,  n'apparaissent qu'en troisième position dans un bulletin d'information... Euh, je veux dire de désinformation.

Parce que je suppose que vous aviez compris que l'on était encore en présence d'un gros numéro d'enfumage désinformateur. Un de plus, va-t-on me dire !

D'abord, une observation : je n'ai entendu aucune autorité syrienne apporter son soutien aux incendiaires de véhicules et de groupes scolaires à Amiens, en France, de même que je ne sache pas que quiconque ait appelé à une réunion du Conseil de Sécurité pour se pencher sur les troubles endémiques qui agitent les banlieues françaises depuis des lustres. Quant à Koffi Annan, volant au secours de la paix à Amiens, il semble qu'il se soit fait porter aux abonnés absents.

Mais revenons au bulletin d'informations, ou de dé..., enfin, vous m'avez compris, de ce brave monsieur Teillard.

I. Syrie

1. Damas au ban du monde musulman, après avoir été exclu de la Ligue Arabe, ça veut tout simplement dire que la Syrie est un Etat non seulement souverain, conformément aux principes du droit international, mais par ailleurs absolument indépendant de ces deux organisations arabes ou islamiques, lesquelles, pour le coup, n'ont strictement rien à exiger d'un Etat non-membre ! Ça tombe sous le sens !

2. Damas suspendu à cause de la répression menée depuis 18 mois par le régime syrien... Un journaliste simplement honnête aurait pu observer que la "répression" en question vise des hommes en armes, dont beaucoup d'étrangers. Par ailleurs, du Yémen au Bahrein et de l'Irak à l'Arabie Saoudite elle-même, il semble que les autorités de ces pays soient régulièrement intervenues contre des manifestants, y compris de manière violente, sans pour autant que quelque ligue arabe ou organisation islamique que ce soit ait jugé bon de mettre ces pays au ban...

3. Les rebelles ne sont pas en reste d’ailleurs, mais sur l’échelle de l’horreur... Je doute que l'expression "sur l'échelle de l'horreur" figure dans le communiqué évoqué. Mais bon, nous sommes sur France Inter, non ? Pour le reste, les rapports de l'ONU se suivant et se ressemblant, il me semble avoir déjà épinglé l'alter ego de France Inter, je veux dire France Info, sur une présentation orientée d'un rapport de l'ONU sur les enfants, rapport fabriqué dans les conditions qu'on imagine.

Cela dit, qu'un rapport visiblement biaisé et, de surcroît, rédigé par une commission - droits de l'Homme - dont aucun représentant ne s'est rendu sur place, soit instrumentalisé par la grande presse (pour l'écrasante majorité de nos bonimenteurs et bonimenteuses, le rapport accuse le seul régime de Bachar el-Assad), qui pourrait s'en étonner ?

4. Dans son papier, la dénommée Perrine Mouterde, qui semble avoir récupéré le bureau beyrouthin de désinformation durant les vacances de l'illustre Valérie Crova, ne prononce pas une seule fois l'expression "guerre civile", pas plus qu'elle n'évoque la présence, avérée, d'étrangers aux côtés des "opposants", devenus entre-temps des rebelles.
"L'opposition dénonce des massacres orchestrés par les troupes du régime." Michaël Thébaut, France Inter, 07.06.2012, 6h38.
5. Et n'attendez pas non plus des "journalistes" de France Inter qu'ils évoquent les attentats commis par les "rebelles" contre des institutions non militaires comme une chaîne de télévision voire contre des confrères journalistes délibérément pris pour cibles. Pour l'heure, je ne sache pas que les "forces fidèles à Bachar el-Assad" aient enlevé ni assassiné le moindre journaliste proche de l'"opposition".

Mention spéciale à Florence Aubenas, entendue sur cette même chaîne de France Inter, quelques jours plus tôt, et qui, elle, a tâté de l'enlèvement par des groupes armés, en Irak. Aubenas était venue sur France Inter relater les horreurs infligées à la population syrienne par le seul régime de Bachar el-Assad, ce qui explique qu'elle n'ait croisé aucun druze, chrétien ou allaouite victime des bandes armées s'infiltrant depuis la Turquie, comme elle est restée absolument muette à propos des attaques perpétrées contre des journalistes. 

Pauvre Florence Aubenas !

6. Quant au massacre de Houla, au milieu d'une flopée d'autres massacres, il semble que Ban Ki-Moon lui-même ait admis qu'une guerre par procuration était actuellement menée en Syrie, et sur ce point, on le croit sur parole. Du reste, à propos de Houla, on avait commencé par expliquer que les tueries avaient eu lieu par armes lourdes, armes que seules les troupes gouvernementales possédaient, donc... Mais par la suite, il s'est avéré que l'essentiel des crimes avaient eu lieu par armes blanches... Rappellons aussi les "crimes contre l'humanité" dont les fonctionnaires de la CPI avaient, par pure malveillance, et en se discréditant au passage, affublé le régime de Kadhafi - on est toujours à la recherche des dizaines de milliers de morts par bombardements causés par l'aviation du "dictateur" - et l'on attend toujours de voir nos enquêteurs de l'ONU investiguer sur le sort des nègres de Libye et celui des travailleurs subsahariens durant l'intervention "humanitaire" de l'ONU-OTAN. 

Par parenthèse, le terme de "répression" ne convient nullement au contexte d'une guerre. Ces pauvres journalistes manquent cruellement de vocabulaire !


II. La menace iranienne

Quand on vous dit que ce régime iranien est une menace pour le monde ! C'est en tout cas cela que le bonimenteur de service, sur France Inter, a tenté de nous démontrer l'autre jour, avec l'aide d'une citoyenne israélienne - heureux pays qu'Israël, qui voit ses citoyens sélectionnés comme correspondants préférés des organes de presse étrangers ! Imaginez que le correspondant de France Inter en Corée du Nord soit un Nord-Coréen, ou que le correspondant à Pékin soit un citoyen de la Chine communiste... S'agissant d'Israël, la chose coule de source !

Donc, on a commencé par nous expliquer que face à la menace iranienne, Israël ne pouvait que réagir... Entre nous, ça ne fait que la 1354ème fois qu'un organe de presse se fait l'écho de l'attaque imminente d'un pays souverain par un autre pays situé à quelques milliers de kilomètres de là, mais bon. Puisqu'on vous dit que l'Iran est une menace pour Israël ! 

Détail intéressant : le bon Nicolas Teillard n'a pas osé nous servir l'argument de la "riposte" ; vous savez, à propos des (justes) représailles de l'armée (d'occupation) israélienne après un acte (terroriste) commis par des indigènes de Palestine, généralement baptisés "activistes". Non, le bon Teillard n'a pas poussé l'immonde jusqu'à évoquer une "riposte par anticipation". Il s'est contenté de passer le témoin à Danielle Tabor.

Et que croyez-vous qu'elle nous raconte, la Tabor, pour la 1354ème fois ? Que l'attaque serait imminente, que la défense passive serait en action, et patati et patata. Citation de l'ex-ministre de la Défense passive sur un conflit qui pourrait durer trente jours et causer cinq cents morts.

Cinq cents morts ? Mais dans quel camp ? 

Entre nous, quelqu'un pourrait-il me rappeler : 1. de quand date le conflit israélo-palestinien et 2. combien de morts il a coûtées (parmi la seule population israélienne) ? Et si aux morts et aux blessés éventuels, on ajoutait les déséquilibrés et autres zombies accros aux anxiolitiques et antidépresseurs, produits dont Israël est un gros consommateur ?

Cette pauvre Danielle Tabor n'a pas de chance, d'avoir à livrer un papier sur France Inter alors même que tous les professeurs de droit de son pays sont en vacances, je veux parler des professeurs de droit international qui, en Israël et ailleurs, expliquent à leurs étudiants que ledit droit est fondé sur la souveraineté des Etats et l'inviolabilité de leurs frontières !

Suprême manque de pot, Danielle Tabor ne connaît pas bien la géographie de son pays, sinon elle verrait qu'une agression armée israélienne contre l'Iran supposait forcément la violation des frontières, dans les deux sens : aller-retour, d'un certain nombre de pays voisins, ce qui supposerait à l'égard de ces pays, soit qu'ils soient complices de l'agression israélienne, soit qu'Israël leur déclare, de facto, la guerre !

Mais dès lors qu'elle est nulle en géographie, Danielle Tabor semble ignorer le fait que, pour bombarder l'Iran, Israël a besoin de faire ravitailler ses avions en vol, ce qui suppose que ce pays, grand comme un demi-département français, dispose d'avions ravitailleurs. Vous voyez la Suisse ou l'Autriche acheter des avions ravitailleurs ? Pour en faire quoi, sinon des outils d'agression contre des pays lointains !

Voilà qui nous amène aux Etats-Unis, pour lesquels Israël serait un mercenaire très bon marché, aux dires de Roger Garaudy, que j'évoquais il y a peu. Et il faut certainement avoir présente à l'esprit l'existence de ce mercenariat pour comprendre l'inévitable évocation, tant par Nicolas Teillard que par Danielle Tabor, de l'implication américaine.

Parce que Nicolas Teillard et Danielle Tabor ne sont pas aussi idiots qu'ils essaient de le faire croire : tout le monde a compris qu'Israël, un pays grand comme la moitié d'un département français, n'a pas besoin d'avions ravitailleurs, et que si ce pays en possède, c'est uniquement dans la perspective d'une agression de grande ampleur contre un pays nécessairement lointain, le tout avec un équipement fourni par les Etats-Unis, véritables maîtres d'oeuvre de l'agression. 

Tout le reste n'est que mauvaise littérature, mais il faut croire que certains bonimenteurs, sur France Inter - et il n'y a pas que France Inter ! -, sont persuadés d'être écoutés par des cons !

Tiens, pendant que nous y sommes, je suis tombé l'autre jour sur cette illustration particulièrement parlante, que l'on doit au mouvement "Occupy Wall Street".



Il s'agit de la liste des pays agressés militairement, depuis  la fin de la Seconde Guerre Mondiale, par chacun des Etats dont le nom figure tout en haut (il n'y en a que deux !). Et comme on peut le voir, l'Iran n'a jamais agressé personne ! Et ça, les militants d'Occupy Wall Street en sont conscients et ne se gênent pas de le faire savoir. Autant dire que, même dans ce pays bourré de lobbyistes et de désinformateurs, la vérité avance !

À propos, vous connaissez la nouvelle ? En ce moment-même, il y aurait des immolations par le feu en... Israël. Cette terre bénie des dieux, que dis-je !, de DIEU !

C'est vraiment pas de chance ; décidément, tout fout le camp ! 


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