samedi 25 mars 2017

France. Présidentielle 2017. Retour sur un débat. Episode 2


Il y a eu, donc, ce premier débat contradictoire entre candidats à la présidence de la République française, et comme je l'indiquais au chapitre précédent, je me suis vu dans la position du spectateur d'un télé-crochet, invité à taper '1', '2' ou '3' pour sélectionner le/la candidat(e) à éliminer de la suite de la compétition.

Mon choix s'est, donc, porté sur Emmanuel Macron, dont j'ai lu, dernièrement, qu'il aurait gagné des points dans les sondages à la suite de ce premier débat.

Et là, je vous avoue tomber des nues !

Par parenthèse, dans le précédent chapitre, j'ai vivement critiqué la position assez inconsistante que j'estime être celle de Marine Le Pen, en raison de ce que je pense être un impair magistral consistant à hisser au même niveau le port d'éléments vestimentaires par des femmes tout à fait inoffensives, par ailleurs, d'une part, et les attaques au couteau, à la hache voire à la kalachnikov, perpétrées ça et là par des barbouzes n'affichant aucun signe d'appartenance religieuse, d'autre part.

Mais, comme je l'ai signalé également tantôt, j'ai préservé Marine Le Pen de toute élimination prématurée, et à cela, il y a, notamment, une raison importante, à savoir sa réactivité, ce qui est, forcément, la marque d'une vivacité d'esprit tout à fait remarquable.

Le fait est que Le Pen a été la seule des protagonistes du débat de l'autre jour à avoir spontanément relevé les prodigieuses incohérences contenues dans le discours d'Emmanuel Macron.

Petit retour en arrière, sur ce même blog, il y a quelque temps, je commentais trois meetings tenus le même jour, à Lyon (Mélenchon, Macron, Le Pen), et je vous avouais humblement que je n'avais pas eu la force d'écouter Emmanuel Macron plus de dix minutes, tant son discours sonnait creux.

Démonstration avec ce qui va suivre. Précision utile : je suis un très bon dactylographe, ce qui m'a permis de transcrire une bonne partie de la bande son du débat du 20 mars 2017 sur la chaîne française TF1.

Nous sommes dans la dernière demi-heure du débat ; il est plus précisément question de politique internationale, lorsque la journaliste Anne-Claire Coudray va relancer le débat, à la suite d'une intervention de François Fillon.

(Protagonistes : Journalistes : A.C.C./Anne-Claire Coudray, G.B./Gilles Bouleau - Débatteurs : F.F./François Fillon, B.H./Benoît Hamon, M.L.P./Marine Le Pen, E.M./Emmanuel Macron, J.L.M./Jean-Luc Mélenchon)


Verbatim
A.C.C. Merci beaucoup monsieur Fillon. Justement, vous évoquiez le président américain ; Emmanuel Macron, si vous êtes élu président, dès la fin mai, au G7, vous allez rencontrer Donald Trump, quelle est l’attitude qu’il faut avoir face à un président aussi imprévisible ? 
E.M. Je vais dire deux choses : la première, il y a eu un manque dans notre débat. 
A.C. C. Il y en a eu beaucoup d’autres !

F.F. On n’a pas parlé d’Europe.
 
E.M.  Il y en a eus beaucoup. Mais il y en a un… On a peu parlé d’Europe, très peu, et ce manque est important ; on a peu parlé aussi de finances publiques… 
A.C.C. Parce que vous avez pris du temps de parole pour autre chose… 
E.M. J’ai des désaccords avec François Fillon, on les a exprimés. Mais je pense, sans trahir les autres candidatures, que nous sommes les deux candidats à avoir au moins cherché à faire ce qu’on appelle un bouclage financier... 
M.L.P. D’austérité ! 
E.M. … c'est-à-dire à essayer de dire où est-ce qu’on fait des économies, où est-ce qu’il y a des dépenses à couper,  et… voilà, quel est le chemin de responsabilité  et je suis le seul candidat qui se conforme dès le début à nos engagements européens, parce que, on peut être pour l’Europe, m’enfin, messieurs-dame, ce sera notre désaccord cher Benoît Hamon, être pour l’Europe en disant : les règles sont pour les autres, les problèmes, c’est pour les autres, moi je suis européen quand ça m’arrange, non, et donc, il y a des règles qu’on doit respecter. Donc, je dis juste que c’est facile de faire des cadeaux, on a beaucoup parlé des cadeaux, sans doute trop, des promesses… 
J.L.M. Mais non, lisez mon chiffrage, monsieur Macron ! 
E.M. … on a envoyé des petits mots, mais on n’a pas été cohérents là-dessus, c’est un manque de notre débat. Moi j’ai un projet dont j’assume la cohérence ; il fallait en parler. Si on n’a pas un projet cohérent… 
J.L.M. Moi j’ai vingt milliards d’excédent dans mon chiffrage. 
E.M. Non, on n’est pas d’accord dessus je disais juste qu’on n’en a pas parlé, c’est tout. 
J.L.M. Peut-être bien, mais j’ai vingt milliards d’excédent dans mon chiffrage. 
(Brouhaha) 
A.C.C. Allez-y monsieur Macron. 
G. B. On s’éloigne beaucoup, beaucoup de Donald Trump, pardonnez-moi. 
E.M. Et donc, on a besoin pour cela d’Europe. J’aurai une position extrêmement simple : le mandat que m’aura donné le peuple français, c’est celui de défendre son indépendance et sa sécurité. 
M. L.P. Son indépendance ! 
E.M. Son indépendance et sa sécurité, oui madame Le Pen, parce que je défendrai et je défends l’indépendance de la France. Je la défends sur le plan économique, loin de vos grands rêves, avec un esprit de responsabilité, parce que j’en défends les intérêts et l’intérêt de toutes celles et tous ceux qui produisent et qui consomment, et j’en défends les intérêts sur le plan de la sécurité, et à cet égard, j’ai pris des engagements clairs, qui sont partagés par d’autres candidats, pour investir dans notre défense, pour tenir nos objectifs, pour garder notre neu-, notre autonomie. Mais j’inscrirai cette politique dans une feuille de route diplomatique. Le désaccord que j’aurai(s ?) avec certains c’est l’interventionnisme, qui a pu avoir lieu en Libye, ou ailleurs. Une feuille de route diplomatique, c’est ce qui guide la politique de la France. Une indépendance dans l’Europe, non pas pour s’y fondre, non pas pour s’y confondre… 
M.L.P. émet des sons. 
E.M. … mais pour construire des partenariats structurés, avec les Allemands en particulier… 
M.L.P. C’est vide, complètement vide ! 
EM. … (les Allemands) qui, en effet, doivent partager le fardeau, mais qui doivent nous aider à tenir en Afrique, au Proche et Moyen-Orient notre position. Et une indépendance parce que la priorité de ma politique, ne vous en déplaise, madame Le Pen, ce sera la sécurité des Français dans la lutte contre Daesh, dans la lutte à l’intérieur et à l’extérieur. Donc j’aurai cette politique de crédibilité, de continuité. L’indépendance avec les moyens, loin du chaos, loin de l’insulte à l’égard de l’Europe. Une politique de responsabilité parce que notre histoire… 
M.L.P. C’est incroyable ! 
E.M. … celle de la France et des Etats-Unis, c’est une histoire séculaire. Nous avons ensemble construit la paix dans le monde. Nous avons, ensemble, fait renaître, mais oui, on l’a fait, ne vous en déplaise, monsieur Mélenchon, on l’a fait, avec des alliances historiques, et à cet égard… 
F.F. Avec les Russes aussi, d’ailleurs… 
J.L.M. Avec les Russes, ben oui ! 
E.M.  Et parfois avec les Russes. Nous aurons là-dessus un désaccord. 
F.F. Avec un homme qui s’appelle Staline. 
E.M. Aujourd’hui, les Russes ne partagent pas, monsieur Fillon, c’est mon désaccord avec vous… 
F.F. À l’époque non plus, hein ! Staline ne partageait pas grand-chose avec nous non plus. 
E.M. Vous avez complètement raison, sauf qu’aujourd’hui, je ne construirai pas mon indépendance, comme vous le proposez, madame Le Pen, en allant me rapprocher de monsieur Poutine. Je la construirai avec les outils de cette indépendance… 
F.F. Il faut faire la paix avec la Russie. 
E.M. … avec une politique de responsabilité, avec une vraie politique européenne. Voilà. 
M.L.P. Vous savez quoi, monsieur Macron, vous avez un talent fou… 
A.C.C. Vous êtes trop en avance. 
M.L.P. …vous arrivez à parler sept minutes, je suis incapable de résumer votre pensée, vous n’avez rien dit ! 
E.M. Et j’ai encore parlé, madame Le Pen, j’ai encore parlé moins que vous ! C’est incroyable ! 
M.L.P. Rien dit ! C’est le vide absolu, sidéral ! J’attire l’attention des Français… Il faut qu’ils s’attachent à vérifier qu’à chaque fois que vous prenez la parole, vous dites un petit peu de ceci, un petit peu de cela et jamais vous ne tranchez. On ne sait pas ce que vous voulez… 
E.M. Mais madame Le Pen, je crois que… 
M.L.P. On ne sait pas ce que vous voulez, c’est très…, honnêtement je trouve ça très inquiétant. 
E.M. Mais si vous n’avez pas compris… 
M.L.P. Très inquiétant. 
E.M. … que comme vous, je ne veux pas pactiser avec monsieur Poutine, si vous n’avez pas compris que contrairement à vous, je veux une politique française forte mais responsable, c’est-à-dire pas la ruine, pas les dépenses qu’on ne sait pas financer… 
M.L.P. Ça ne veut rien dire, « forte mais responsable » ! Ça ne veut rien dire ! 
E.M. … quand vous aurez compris que comme, contrairement à vous, je propose d’avoir une France forte dans une Europe que j’assume pleinement, c’est notre grand désaccord. 
M.L.P. C’est de pire en pire. 
E.M. Eh oui, eh oui, mais c’est notre désaccord. Alors quand on n’est pas d’accord avec vous on peut être clair. C’est juste qu’on n’est pas d’accord… 
M.L.P. C’est pas clair du tout ! 
E.M. … il y a beaucoup de Français qui ne sont pas d’accord avec vous.
Fin (provisoire) du verbatim


Alors, vous avez tout compris ? Oui ? Non ?

Je vous avoue que j'ai lu, écouté, visionné des choses ici et là, après ce premier débat, sans qu'à aucun moment je ne tombe sur une analyse digne de ce nom, à croire que la France, le pays de Blaise Pascal, de Montesquieu, de Descartes, de Sartre..., manque de cerveaux capables d'analyser un discours politique. Il est vrai que nos soi-disant politologues ne sont plus que des politocrates - comme bureaucrates mais spécialisés en blablabli-blablabla politique - juste capables de paraphraser les sondages !

Et, comme preuve que les études supérieures - pas inférieures ! -, ça sert à quelque chose, je m'en vais, incessamment, expliquer à notre classe journalistico-politicarde ce qu'il y a de tout bonnement stupéfiant dans le discours de cette BAUDRUCHE nommée Emmanuel Macron.

Par parenthèse, avez-vous bien relevé la question initiale, posée par Anne-Claire Coudray à Emmanuel Macron ?

A-C. C. Merci beaucoup monsieur Fillon. Justement, vous évoquiez le président américain ; Emmanuel Macron, si vous êtes élu président, dès la fin mai, au G7, vous allez rencontrer Donald Trump, quelle est l’attitude qu’il faut avoir face à un président aussi imprévisible ?

Et maintenant, relisez bien la réponse, ou plutôt la tentative désespérée de Macron, de ne pas répondre à la question posée.  Je dois dire que, dès le début de la "réponse" de Macron, je me suis mis à entendre des "gloussements" dans le casque (audio) ; un très bon casque, au demeurant, permettant d'entendre jusqu'à la respiration des débatteurs. Et là, je réalise que l'auteur des "gloussements" n'est autre que Marine Le Pen, laquelle n'en croit pas ses oreilles et n'en finit pas de le manifester ("c'est pas croyable !", "mais ça ne veut rien dire !"). Mais, pour des raisons tant techniques que pratiques, il n'a pas été possible de transcrire toutes les interventions 'parasites' ayant accompagné le discours des uns et des autres.

La question ? Fin mai, au G7, vous rencontrez Donald Trump...

Et là, on a l'impression que le "jeune" Macron est comme pris de panique. Je ne suis pas un adepte de Freud - et ce d'autant moins que je l'ai longtemps étudié à la FAC, à Strasbourg -, mais j'imagine que les adeptes de la secte psychanalytique verront dans le comportement de Macron ce que l'autre appelait un "acte manqué".

C'est simple, Macron ne se voyait pas du tout dans la position d'un président français apparaissant, au prochain G7, aux côtés de six autres grands dirigeants du monde !

Pour le reste, examinez bien ma transcription, en la rapprochant de l'original sonore (Youtube). Je précise que l'on est dans la dernière demi-heure.

Et si, comme moi, vous avez quelques notions de linguistique, analysez bien les phrases d'Emmanuel Macron, sa technique d'évitement (ou comment ne pas répondre tout en donnant l'impression de répondre) ainsi que ses lapsus plutôt croustillants (cf. "comme vous/contrairement à vous").

On en reparle bientôt ?


À suivre...