vendredi 23 décembre 2016

Marine le Pen et le plafond de verre. Episode 4

FIGURES IMPOSÉES

Commençons par rassurer certaines personnes coutumières de ce blog : non, elles n'ont pas la berlue et, non, je n'ai pas perdu la tête ni ne suis devenu un partisan de l'idéologie "extrémiste de droite" !

Il se trouve que j'ai une petite culture scientifique (autant que littéraire, d'ailleurs), et que je sais pertinemment que la Science impose que l'on se soumette aux faits plutôt que de les soumettre à nos désirs et envies.

Pourquoi le taire ? D'un point de vue purement scientifique, c'est-à-dire objectif, nous assistons à une véritable débâcle des (grands) dirigeants du monde, une réelle faillite qui explique amplement la poussée de mouvements nationalistes un peu partout, notamment dans la partie occidentale de l'Europe.

Et comme, de surcroît, vous avez, en France, un régime autocratique qui ne dit pas son nom, initié par un général de brigade né au XIXème siècle, l'unique régime de ce type en Europe occidentale, avec, par ailleurs, une classe politique entièrement obnubilée par le culte de l'Homme (plus souvent que la femme) providentiel(le), j'en suis arrivé à penser que la seule chose qui pourrait sortir la France du marasme idéologique dans lequel elle se morfond depuis bientôt soixante ans serait une victoire de Marine Le Pen à la présidentielle de 2017.

Ailleurs, on appellerait cela un électro-choc, et ce fut précisément l'objet d'un courrier que j'adressai, tantôt, à ce "sauveur de l'Humanité" bien imprudent, à mon goût, qu'est Emmanuel Macron (voyez le premier épisode de cette série).

J'observe simplement que de nombreux visiteurs de ce blog ne me lisent qu'en diagonale : "Non mais, sans blague, tu roules maintenant pour Le Pen !?". Le fait est que s'ils lisaient vraiment ce qui est écrit, au lieu de procéder à des raccourcis dans leur petite cervelle, ils constateraient que cette série, que je consacre à Marine Le Pen, depuis plusieurs semaines maintenant, est truffée de critiques à l'égard d'une responsable politique dont il me semble avoir affirmé, en diverses occasions, que les prétendus plafonds de verre, on se les fabriquait souvent soi-même

Ce qui veut dire, en bon français, qu'on ne peut pas à la fois vouloir faire du Front National un parti d'aboyeurs et de vociférateurs, d'une part, et un mouvement de rassemblement et de concorde nationale, d'autre part. Entre les deux attitudes, il va bien falloir choisir.

Une explication ?

J'entends bien que l'on raconte partout que Marine Le Pen et la nouvelle direction de son parti s'attachent à "dédiaboliser" un mouvement à l'image passablement ternie par les "saillies verbales et outrancières" de Jean-Marie Le Pen. Fort bien. Saluons cet effort plus que louable.

Seulement, voilà : qui, donc, a déclaré, un jour, que les prières de rues étaient assimilables à l'Occupation (de la France par les armées d'Hitler), Jean-Marie Le Pen ou Marine Le Pen ? 

Bien évidemment, on me fera observer que Marine Le Pen a eu gain de cause devant les tribunaux, les organisations musulmanes qui l'avaient attaquée en Justice ayant été déboutées. Mais, entre nous, il est où, le gain politique, pour Marine Le Pen ? En clair, comment va-t-elle s'y prendre, demain, pour convaincre les Français musulmans - qui représentent des millions d'électeurs, tout de même ! - de voter pour elle et ses troupes aux prochaines élections ? Le fait est que de nombreux Musulmans, eux-mêmes réfractaires aux prières de rues, ont pris les mots de Marine Le Pen comme autant de flèches visant l'ensemble de leur communauté !

Pour ma part, je suis un adversaire résolu des prières de rues, que certains Musulmans tentent d'imposer à diverses municipalités ; néanmoins, j'estime qu'il existe des arguments autrement plus intelligents à leur opposer que la simple invective bête et méchante à la sauce Le Pen. (**)

Je commencerai par observer une bien étrange et tragique amnésie de la part de la présidente du Front National - amnésie dont Jean-Marie Le Pen ne souffre visiblement pas, lui ! -, lorsqu'elle feint d'ignorer l'apport des soldats amenés, manu militari, des colonies, pour libérer la France du joug hitlérien, un grand nombre de ces tirailleurs étant de confession musulmane (Archive01) (Archive02).

J'ai intitulé ce chapitre "Figures imposées" en m'inspirant d'un "faux-ami" tiré de l'anglais. En effet, l'anglais "figure" se traduit en français par chiffre, nombre...; en clair, il s'agit de données comptables. Ex.: "The second figure looks like a five" (le deuxième chiffre ressemble à un 5), ou encore "Unemployment figures" (les chiffres du chômage) : chiffres, nombres, données comptables ou comptabilisables, etc.

Le fait est qu'en matière politique, il est une "figure imposée", une donnée incontournable (en anglais, l'on dirait : an inescapable fact), à savoir le principe qui veut qu'un second tour de présidentielle se gagne avec au moins 50 % des voix plus une !

D'où mon interrogation : comment Marine Le Pen compte-t-elle s'y prendre pour obtenir 50 % des voix lors d'un second tour de présidentielle, en poussant, délibérément, tant de gens (exemple des millions de Français musulmans), dans le camp de ses adversaires, voire, dans le meilleur des cas, dans l'abstention ?

Et il n'y a pas qu'elle ! Voilà que l'on apprend que le maire de Béziers, l'ineffable Robert Ménard, apparenté FN, va devoir se justifier devant les tribunaux pour ce qui ressemble à de l'incitation à la haine... Encore un qui doit considérer que les électeurs de confession musulmane comptent pour du beurre, au point de pouvoir s'en passer. Le fait est que Ménard a une excuse, lui qui peut se faire élire maire à la faveur d'une triangulaire au second tour. 

On a vu également Marion Maréchal-Le-Pen, candidate à la présidence de la région PACA, se lancer dans une diatribe contre le Planning Familial, à croire qu'elle cherchait à éloigner d'elle tout un électorat féminin, voire féministe, aggravant son cas par des affirmations tout à fait étranges sur une supposée supériorité du christianisme sur d'autres religions... Et, comme chacun sait, Maréchal-Le-Pen n'a pas été élue présidente de la région PACA, les socialistes préférant se saborder afin de la priver de la triangulaire tant espérée. 

Pour ma part, n'étant pas un sympathisant du Front National, je n'en suis pas moins favorable à toutes formes d'échanges de vues avec des militants de ce parti, dans la mesure où l'on ne choisit pas forcément son voisin de zinc dans le bar-tabac du coin..., et je vois bien combien est grand le malaise qu'éprouvent moult d'entre eux devant de bien étranges initiatives.

Je pense, notamment, à la promotion plus que rapide, aux yeux de certains, d'un Florian Philippot devenu omniprésent dans les médias, où il ne s'est pas privé de prendre ses distances avec la Manif pour tous, à croire que le vote de millions de catholiques ne l'intéresse pas du tout. Entre temps, l'homme avait fait un "coming out", qui n'était pas vraiment un "coming out", tout en ressemblant à un "coming out". Et moi de penser que la "Manif pour tous", en clair, les catholiques traditionalistes, voire les chrétiens tout court, ça devait représenter un paquet de gens que la désinvolture, tant de Marine Le Pen que de Florian Philippot ne pouvait que pousser dans les bras d'un... François Fillon, par exemple.

Le fait est que, lors des dernières régionales, dans la très catholique région Grand-Est, que je connais bien, la triangulaire de fait imposée par le dissident socialiste n'a pas du tout profité au candidat F. N., comme preuve que, coming out ou pas, le côté "flou" du personnage (Philippot) a dû rebuter plus d'un(e) électeur/trice.

Par parenthèse, Philippot, combien de divisions ? En clair, quel est son potentiel électoral au sein du FN ? J'observe simplement que Jean-Marie Le Pen ne se prive jamais de médire sur F.P. et, apparemment, il n'est pas le seul.

Les situations évoquées plus haut me semblent de nature à invalider un peu plus la thèse d'un quelconque plafond de verre, qui empêcherait le Front National d'accéder à des responsabilités politiques nationales. Le fait est que c'est en parfaite connaissance de cause que divers candidat(e)s et responsables de ce parti ont choisi de dresser une partie de l'électorat, singulièrement les Musulmans, mais, plus étrangement aussi, une grande majorité de Catholiques - forcément et dogmatiquement opposés à un quelconque mariage "pour tous", voire à toute forme d'union estimée contre-nature par les 'Saintes Écritures' - contre le parti de Marine Le Pen.

J'observe qu'en cette fin d'année 2016, Marine Le Pen a entamé ses déplacements sur le terrain par des voyages Outre-mer, dans l'Océan Indien puis en Guyane, ce dont je la félicite. Et j'espère qu'elle n'évitera pas non plus la Nouvelle-Calédonie, ni la Martinique et la Guadeloupe ! Je sais que le F.N. souffre encore d'un profond ostracisme dans certaines régions (éloignées) de France, et je ne saurais trop inviter mes amis martiniquais et guadeloupéens à se montrer civilisés, ainsi qu'il sied de faire lorsqu'on reçoit quelqu'un venu - pacifiquement ! - d'assez loin pour vous rendre visite.

Et c'est là que j'aurais une suggestion à faire à Marine Le Pen : dans la mesure où certains territoires d'Outre-mer (mais je n'oublie pas la Corse !) sont agités par de fortes pulsions séparatistes, pourquoi ne pas leur tenir un discours fort simple : "Vous voulez l'indépendance ? Je suis prête à vous la proposer, à la condition que vous soyez assez nombreux à la voter. Ça s'appelle la démocratie. Chiche !"

Et là, je suis certain que même un Elie Domota serait disposé à dérouler le tapis rouge sous les pieds de la présidente du F.N., en la recevant en grandes pompes en Guadeloupe ; et comme les voisins martiniquais ne voudront pas être en reste, on devine aisément la suite.

Alors, à quand une visite triomphale de Marine Le Pen aux Antilles ? Ben, aux conditions que je viens d'évoquer, car je ne vois pas très bien les "Domiens" cracher sur un surcroît de démocratie qui pourrait jouer en leur faveur !

Le problème est qu'un plafond de verre, ça se combat avec de l'audace (cf. une femme présidente de la République, Ségolène Royal a été à deux doigts de le faire, avec des positions inédites, comme sa démocratie participative, n'ayant été battue probablement que par la magouille et les millions de Kadhafi versés à un authentique gangster ; la vérité sortira, tôt ou tard, du puits !) ainsi qu'avec des idées réellement novatrices.

Reprenons le voyage récent de Marine Le Pen en Réunion, à Mayotte et en Guyane. Bien évidemment, la question de l'immigration sauvage qui touche ces départements ne saurait être éludée, mais peut-on sérieusement se contenter de propositions archi-rabachées, comme la non-scolarisation des enfants de clandestins ? 

Pour ma part, je me mets à la place d'un non-électeur du FN, farouchement réfractaire aux idées de Marine Le Pen et, franchement, j'estime qu'il lui faudrait trouver autre chose que les recettes éculées de l'extrême-droite pour me convaincre de voter pour elle (entre nous, n'est-il pas affligeant, voire consternant, de faire payer à des enfants les erreurs de leurs parents ?), ce que je résumerais volontiers par une formule simple : en politique, une grande idée vaut mieux que cinquante petites !   

Une grande idée ? Prenez le slogan "La France apaisée" et la devise "Au nom du Peuple". Pourquoi ne pas le dire ? Je les trouve excellents. Mais, du coup, je ne comprends pas très bien comment Le Pen et d'autres peuvent noyer une grande idée, comme la question de la "rétrocession du pouvoir au peuple" - pour reprendre la jolie formule de Jean Ziegler - dans un fatras de considérations boutiquières comme celles qui ont vu s'opposer, tout récemment, Florian Philippot et Marion Maréchal-Le-Pen !

Entre nous, imagine-t-on, un instant, le peuple français, convoqué par Marine Le Pen, faire la fine bouche en refusant d'exercer un pouvoir (la démocratie directe) dont la politocratie bonapartiste le prive depuis si longtemps ?

Il se trouve que, sur cette question, j'écoutais un jour, plus ou moins distraitement, l'interview d'un responsable politique français : et voilà qu'il déclare quelque chose qui me fait littéralement sursauter. Et là, je me dis : "Il faut absolument que tu le notes !", tout en me promettant de lui écrire pour le féliciter. Ce que je n'ai pas manqué de faire depuis...


Prochain épisode : L. A. (no)confidential 



(**) Post-scriptum 

Je fus, un jour, amené à dispenser des cours de culture religieuse dans un établissement (= lycée) catholique sous contrat de la région parisienne. Compte tenu du caractère bigarré des populations concernées (avec un bon tiers de jeunes issus de l'immigration, comme on dit dans les médias), j'ai délibérément renoncé au mauvais exposé, cher à ce genre d'établissements, et inspiré de l'Histoire Sainte du temps des missionnaires (n.b. un(e) missionnaire qui ne ferait pas de prosélytisme ne serait pas un(e) bon(ne) missionnaire !), pour aborder la religion d'un point de vue strictement culturel, voire ethnographique. Et, pour soutenir l'attention de mes auditeurs, je leur soumettais régulièrement des "quiz".

Exemple : quelle est, donc, des trois religions monothéistes, celle qui a les plus petits lieux de culte ?

Voilà les élèves se perdant en conjectures : "Mais, c'est pas possible que ce soit une question de taille, monsieur !"

- Et pourtant si ! rétorquais-je. Et je leur montrais des images comme celles qui suivent :


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Et là, on entendait une clameur : "Ah oui, bien sûr !".

C'était tout à fait évident, mais ils n'y avaient pas pensé, pas même les jeunes originaires du Maghreb, du Sahel africain voire d'autres pays musulmans.

Moi qui connais un peu l'Islam, en ma qualité de fils (devenu incroyant !) de pasteur protestant (un tantinet islamophobe, comme tout religieux chrétien qui se respecte !), il m'arrive assez souvent de croiser le fer avec des gens se pensant musulmans (si, si, ça existe, comme il existe des gens [ex. mes deux premières 'fiancées' : une Alsacienne et une Allemande] se prenant pour des Juifs/ves sous le simple prétexte que leurs parents étaient juifs, ou catholiques, sikhs et que sais-je encore, sous le simple prétexte qu'ils portent un prénom ou un patronyme comme-ci ou comme-ça.). Et là, je les pousse régulièrement dans leurs derniers retranchements en les invitant à me rappeler les Cinq Piliers de l'Islam, à savoir les cinq préceptes fondamentaux censés guider la vie quotidienne du croyant musulman. L'un de ces "piliers", en principe, le deuxième, prescrit cinq prières quotidiennes, sans préciser à aucun moment l'endroit où elles sont censées se produire.

Le fait est que l'Islam est, originellement, une religion de bédouins, c'est-à-dire de gens du désert et de grands espaces sablonneux. Et, dans ces espaces, les villages, bourgs et autres villes sont plutôt rares. Les mosquées aussi !

Imagine-t-on seulement un Touareg traversant des centaines de kilomètres, cinq fois par jour, juste pour s'en aller prier dans la mosquée la plus "proche" ? C'est précisément à l'intention de ces gens que les pères de l'Islam ont inventé cette chose que je trouve absolument géniale qu'est le tapis de prière, lequel permet au/à la croyant(e) de transporter sa mosquée sur lui/elle et, de surcroît, de pouvoir s'adresser à son Dieu directement et sans intermédiaire, ce qui constitue, notamment, l'ADN même du sunnisme, religion à 100 % laïque car dénuée de tout clergé

Voilà comment, moi, je disqualifie les prières de rues quand il m'arrive d'en discuter avec des Musulmans, car nullement nécessaires, dès lors qu'elles ne sont prescrites par aucun traité, aucun code de l'Islam, n'étant suscitées que par un fort penchant pour la bigoterie, à savoir la simple envie de s'exhiber en public, alors même qu'on prétend que "Dieu sonde les reins et les cœurs", ce qui veut dire qu'il n'a que faire des salamalecs !

En un mot comme en cent, ces gens (pourquoi toujours des hommes, au fait !?) qui vont lever les fesses dans les rues de certains quartiers ne le font nullement par nécessité, mais pour se montrer, se donner en spectacle. Et pour cette seule raison, moi, si j'étais maire ou responsable de l'ordre public dans un quelconque patelin, j'interdirais purement et simplement ces démonstrations d'exhibitionnisme.

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Par ailleurs, j'observe qu'il y a 36.600 communes en France, et seulement 2.500 endroits recensés comme lieux de culte dédiés à l'Islam ; ça nous fait un nombre considérable de croyants musulmans ne mettant jamais les pieds dans une quelconque "mosquée", ce qui n'en fait pas de mauvais Musulmans pour autant !

D'où ma consternation en entendant Marine Le Pen assimiler prières de rues et  Occupation nazie..., car elle n'avait nullement besoin de tomber dans l'insulte et l'invective, là où un peu de culture et de jugeote aurait suffi !

Vous comprendrez peut-être maintenant pourquoi il m'arrive régulièrement d'estimer que Marine Le Pen ne travaille pas assez (ses dossiers) !