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jeudi 8 mars 2018

A complotiste complotiste et demi : l'exemple de l'ex-espion russe et de sa fille empoisonnés en Grande-Bretagne


Vous connaissez la nouvelle ?

Vladimir Poutine est un demeuré !

Non ? Vous n'êtes pas convaincus ? Mais enfin ! Il faut être demeuré pour piloter un attentat contre un ex-espion russe et sa fille à moins de trois semaines d'une élection présidentielle que tout le monde juge courue d'avance. Et le tout pour quel intérêt, je vous le demande ! 

Non mais, quand je vous dis que le père Poutine n'est pas très intelligent ! Et voilà une campagne présidentielle pourrie !

Je vois que vous n'êtes pas très convaincus par ma petite diatribe. Alors voyez ce qu'a dit cette charmante présentatrice d'un journal télévisé sur la chaîne française France3 :

"L'ombre du Kremlin pèse sur le double attentat..." (Carole Gaessler, 8 mars 2018, 19h46).

L'ombre du Kremlin ! Parce que la journaliste sait qui est derrière l'attentat ?

Bien évidemment, madame Gaessler n'est pas ce que d'aucuns appellent une "complotiste", ce néologisme inventé par des crétins, dès lors qu'il est évident qu'il a bien fallu une préparation minutieuse pour organiser cet attentat, en commençant par la mise en oeuvre de moyens techniques (arme chimique sophistiquée) dont seuls des experts présents dans un très petit nombre de pays peuvent disposer. 

Voyez cet avis paru dans Le Monde

Bientôt la présidentielle

Le ton est récemment monté entre les deux pays en raison des accusations de manipulation des réseaux sociaux par les Russes au moment du référendum sur le Brexit. En janvier, le ministre de la défensebritannique, Gavin Williamson, a fait scandale en affirmant que Moscou pouvait provoquer « des milliers et des milliers » de morts au Royaume-Uni au moyen de cyberattaques visant les infrastructures énergétiques du pays.
A l’approche de l’élection présidentielle russe du 18 mars, l’hypothèse d’une implication de Moscou dans l’attentat de Salisbury alimente les spéculations sur la stratégie de Vladimir Poutine. Contredisant la thèse selon laquelle la période électorale serait peu propice à ce genre de coup d’éclat, Alexandre Goldfarb, un dissident russe réfugié aux Etats-Unis et proche de M. Litvinenko, a estimé mardi qu’une telle action pourrait« renforcer l’image de Vladimir Poutine comme solide leader nationaliste » et satisfaire « la majorité des Russes ».


Vous avez compris que ce monsieur Goldfarb, opposant réfugié aux... Etats-Unis, était tout sauf un "complotiste", pas plus que ceux qui voient la main de Moscou derrière moult manipulations et tentatives d'influencer telle ou telle élection ou de produire telle ou telle "fake news", tant il est vrai que les accusateurs de Moscou n'ont jamais tenté de manipuler qui que ce soit, étant trop vertueux pour ça !

Ce monsieur Goldfarb ne pousse-t-il pas la sophistication de sa pensée au point de soutenir que le plus probable, dans cette affaire, c'est précisément ce qui semble le moins évident, à savoir la volonté présumée de Poutine d'aller à contre-courant, contredisant délibérément la thèse selon laquelle la période électorale serait peu propice à ce genre de coup d'éclat.

Admirable monsieur Goldfarb ! Le problème est qu'en face, plein de gens, à commencer par moi-même - et contrairement à l'introduction de ce papier - se demandent quel intérêt Vladimir Poutine trouverait à éliminer un espion éventé et à la retraite, rangé des bagnoles et ne menaçant en rien le leadership du maître du Kremlin.

Du coup, en poussant la réflexion, nombreux sont ceux qui, comme moi, posent une question toute simple : "À qui profite le crime ?", sachant que ce ne peut être Poutine.

Et voilà qu'on se met à penser à des gens, voire des pays, qui auraient aimé savonner la planche de Poutine en vue de ces élections, histoire de ternir un peu, et même beaucoup, l'image de quelqu'un qui semble être devenu leur bête noire.

Et c'est là qu'on se rappelle un autre fait divers : l'assassinat d'un opposant présumé de Poutine, un certain Boris Nemtsov, quasiment sous les fenêtres du Kremlin.

23h15 vendredi soir, sur le Grand pont de pierre, à quelques pas du Kremlin à Moscou. Boris Nemtsov, l'un des opposants les plus farouches à la politique menée par Vladimir Poutine, se promène à pied avec une jeune femme. Une voiture s'approche de lui. Une personne sort une arme et tire des coups de feu. Quatre balles atteignent le dos de Boris Nemtsov, le tuant sur le coup. 

Et, déjà à l'époque, on se disait qu'il y avait anguille sous roche, tant la probabilité que Poutine fasse éliminer un opposant si près du Kremlin paraissait extravagante et sentait l'implication de services secrets étrangers, en tout cas hostiles à Poutine.

Et voilà qu'on se prend à imaginer des provocations de puissances étrangères à la Russie !

- Mais monsieur, que racontez-vous là ?, va-t-on sûrement me rétorquer. Voilà que vous donnez dans le complotisme !

Parce que accuser Moscou de tous les maux ne relève nullement du "complotisme", tandis que de supposer que des agents étrangers malveillants à l'égard de Poutine (bien entendu, l'autre Goldfarb réfugié aux Etats-Unis n'est manipulé par personne !), fait automatiquement de vous un dangereux tenant de la "théorie du complot".

Vous savez quoi ? Il faut vraiment que les adversaires de Vladimir Poutine à travers le monde se sentent dans une merde noire pour en arriver à échafauder des plans aussi foireux, allant jusqu'à tuer de sang froid, et avec le plus parfait cynisme, le tout sans la moindre chance de convaincre le grand public, tant ces opérations paraissent cousues de fil blanc.

En ce qui me concerne, contrairement à M. Goldfarb, je suis persuadé que Poutine, dont tout le monde voit bien qu'il jouit d'une popularité interne que bien des collègues dirigeants peuvent lui envier, est à des années-lumière des misérables stratagèmes imaginés à son propos par de pauvres esprits hystériques, à l'instar du ci-devant ministre britannique des affaires étrangères. 

Il semble, en tout cas, que les autorités russes gardent la tête froide, habituées qu'elles sont aux coups fourrés et foireux de leurs adversaires ici ou là ; voyez la déclaration de la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères :

« Cette histoire a dès le début commencé à être utilisée pour doper la campagne antirusse dans les médias », a répliqué, mercredi la porte-parole du ministère des affaires étrangères russe, Maria Zakharova, lors d’une conférence de presse. Dénonçant des « accusations sans fondement », Mme Zakharova a déclaré : « Cette histoire va finir comme d’habitude : d’abord, des accusations sans fondement, puis ils garderont leurs secrets, et ni les journalistes, ni la population, ni les politiques ne sauront ce qui s’est réellement passé. »

Tiens, by the way, les télévisions nous ont montré un certain nombre d'images provenant de caméras de vidéo-surveillance et montrant l'ex-espion tantôt seul dans un magasin, tantôt en compagnie de sa fille. Il se trouve simplement que l'attentat a eu lieu en plein jour ou presque, et dans l'espace public, les villes britanniques regorgeant de systèmes de vidéo-surveillance. Du coup, on parie combien que les images fournies par les caméras vont permettre aux enquêteurs de repérer quelques individus louches ?

Et si aucun ressortissant russe n'apparaît sur les images, alors...


Lecture (mise à jour du 14.03.2018)

mercredi 31 mai 2017

Réflexions sur la soi-disant 'théorie du complot' §1

Vous savez quoi ?

À en croire la rumeur, ce serait le terrible dictateur nord-coréen, Kim Jong-Un, qui aurait trucidé son demi-frère, Nam, en Malaisie, en le faisant empoisonner dans un aéroport par deux femmes armées d'un poison aux effets dévastateurs.

Vous savez aussi ce qu'on raconte partout, je veux dire dans les milieux bien sous tous rapports ? La Russie aurait fait espionner Hillary Clinton, dans le but de peser sur les élections américaines, de même qu'elle interviendrait copieusement dans les affaires intérieures d'autres Etats, via des hackers très bien organisés.

Ce qu'il y a d'amusant avec de nombreuses rumeurs, c'est que leurs auteurs et exploitants sont les premiers à récuser tout un tas d'autres "rumeurs", rapidement vilipendées et dégradées sous le terme collectif de "complotisme" ou sous le label "théorie du complot", laissant sous-entendre que leurs auteurs [les auteurs des dernières rumeurs, pas les premiers !] ne seraient qu'affabulateurs et colporteurs de ragots sans fondement.

Ce qui fait que tous ceux, par exemple qui, comme moi, n'adhèrent pas entièrement à la thèse "officielle" (je veux dire aux thèses, au pluriel !) concernant les événements du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis sont forcément des complotistes ; tout le contraire de ceux qui voient la main de Moscou derrière la moindre attaque informatique par des hackers, ainsi que l'observait un auteur du site Russia Today à propos de toute une flopée de complots récemment attribués à la Russie.

Erreur en-deçà, vérité au-delà, ou l'inverse !

Tout le monde sait, par exemple, que les frères Kennedy (John F. K. et Robert) n'ont jamais été assassinés ; pas plus qu'Abraham Lincoln, pas plus que l'on a tiré sur Ronald Reagan et le pape Jean-Paul II, pas plus que le Congo de Lumumba, l'Iran de Mossadegh ou le Chili d'Allende n'ont fait l'objet de la moindre ingérence étrangère, etc., pour n'évoquer que ces quelques élucubrations complotistes. 

De même que Fidel Castro, vous savez ? le fameux dictateur bien imprudemment défendu par Ségolène Royal [cf. la série d'articles que j'ai consacrés à la question sur ce blog], n'a jamais fait l'objet de la moindre tentative d'assassinat par la C.I.A. !

Il se trouve que, justement, une barbouze cubaine autrefois stipendiée par la C.I.A. se met à table, et son récit ne manque pas de sel !



On y apprend, entre autres choses, comment des barbares particulièrement cyniques - quel pléonasme ! - ont délibérément incité de braves familles cubaines à se débarrasser de leurs enfants, le tout dans le seul et unique but de déstabiliser un pays souverain !

Du coup, on se prend à penser que, si ça se trouve, le Nord-coréen Kim Jong-Un, tellement vilipendé par ceux-là mêmes qui se sont acharnés contre Fidel Castro, n'est pas forcément un si mauvais dirigeant pour son pays !

Et j'irai même plus loin : qu'est-ce qui nous dit, après tout, que cet attentat en Malaisie n'a pas été une opération "sous fausse bannière" (en anglais 'false flag'), dûment montée par des gens [disons les dirigeants d'un pays !] mal intentionnées, dans l'unique but de tenter de discréditer un peu plus le dirigeant nord-coréen, à la manière de ce qui fut fait avec Saddam Hussein ou Mouammar El-Khadafi ?

J'ai trouvé cet intéressant texte en ligne et le reproduis in extenso ci-dessous, avant qu'il ne disparaisse du site concerné.

Miami (AFP) - Un ancien espion de la CIA d'origine cubaine a dédié sa vie à tenter d'assassiner Fidel Castro et à déstabiliser le régime communiste, mais Antonio Veciana affirme aujourd'hui que cette vie fut une "histoire d'échecs" même s'il ne regrette rien. 
"J'étais un improbable terroriste", raconte-t-il dans son livre "Trained to Kill" (formé pour tuer) co-écrit avec le journaliste Carlos Harrison. "J'étais maigrichon, asthmatique et rongé par l'incertitude".
L'ancien espion âgé aujourd'hui de 88 ans, assis à côté de son déambulateur dans le salon de sa fille à Miami, s'explique: "Ce que j'ai fait c'est ce que les terroristes font. C'est juste que ce n'était pas appelé comme tel". 
Le livre narre dans le détail comment l'agent de la CIA David Atlee Phillips --connu sous l'alias "Bishop" (évêque)-- l'a recruté en 1959 et l'a formé à La Havane dans le but de tuer Fidel Castro, mort l'an dernier de causes naturelles.
"Bishop m'a invité à déjeuner", se rappelle-t-il. "C'était facile, il n'avait pas besoin de me convaincre des dangers du communisme à Cuba".
 
- Rumeurs - 
Comptable à la Banque nationale de Cuba, M. Veciana a appris à se rendre invisible, à comploter, à ne plus avoir de scrupules et à se méfier. 
"Au départ l'idée était de déstabiliser" le régime, explique-t-il. "Dans les pays qui sont déstabilisés, les gens croient aux rumeurs". 
"C'était mon boulot: lancer ces rumeurs". 
La première d'entre elles fut un projet de loi qui prévoyait que le gouvernement cubain enlève aux parents la garde légale de leurs enfants. 
Cette fausse information a permis l'envoi, par leurs parents, de quelque 14.000 enfants aux Etats-Unis dans un exode connu sous le nom d'"opération Peter Pan". 
"Beaucoup de parents ont ensuite revu leurs enfants, mais d'autres n'ont pas pu les revoir parce qu'ils sont morts ou parce qu'ils ne pouvaient pas quitter le pays", selon M. Veciana. 
De 1960 à 1962, les parents déposaient leurs enfants dans des locaux de l'Eglise catholique. Ces mineurs non accompagnés étaient ensuite accueillis dans des camps en Floride. 
M. Veciana dit ne pas regretter d'avoir séparé ces enfants de leurs parents. 
"C'était peut-être irresponsable, mais je faisais cela par conviction", explique-t-il. "A l'époque j'étais convaincu que ce que je faisais était bien, donc je le referais". 
- Groupe para-militaire - 
M. Veciana a fui aux Etats-Unis en 1961 après une attaque ratée contre Castro qui aurait facilement mené les autorités cubaines jusqu'à lui. 
Quand il a été contacté par Bishop à Miami, M. Veciana a fondé un groupe para-militaire anti-Castro nommé "Alpha 66" qui, pendant les années 60 et 70, a mené des attaques de type commando contre le régime castriste. 
"Ces attaques nourrissaient l'espoir, et quand la presse en parlait c'était l'euphorie -- les gens avaient encore l'espoir de pouvoir gagner la bataille", raconte M. Veciana. 
Il reconnaît cependant que les succès et l'ampleur des attaques étaient "toujours exagérés". 
Comme beaucoup de Cubano-Américains de son âge, M. Veciana en veut au président John F. Kennedy qu'il accuse d'avoir "trahi" les exilés cubains en retirant l'armée américaine de l'opération anti-castriste de la Baie des cochons à Cuba en 1961, qui fut un échec. 
Il prétend aussi avoir vu Bishop rencontrer Lee Harvey Oswald trois mois avant l'assassinat de JFK au Texas en 1963. Oswald étant considéré comme le meurtrier de l'ex-président. 
- 'Comme un raté' - 
Une dernière tentative de tuer Castro à Santiago du Chili a échoué et M. Veciana a abandonné des années plus tard toute tentative d'attenter à la vie du dirigeant cubain. 
Il a aussi mis fin à ses actions pour discréditer Ernesto "Che" Guevara après sa mort en 1967 en Bolivie. Le révolutionnaire argentin est devenu à l'inverse une icône de la gauche. 
"J'essaie vraiment de ne pas trop y penser, parce mon histoire est une histoire d'échecs", estime M. Veciana. "Quand vous échouez par différentes circonstances vous pensez que vous n'avez pas fait la bonne chose, mais surtout vous vous sentez comme un raté". 
En 1979, après avoir plusieurs fois tenté de se suicider, Veciana a finalement jeté l'éponge de l'espionnage et du métier de tueur à gages. 
"Ma vie secrète est finie" sont les derniers mots de son livre. (Source)