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mardi 10 mars 2020

Sémantique de la désinformation #28


Épisode §28. Paris vaut bien quelques fake news !

Dans la rubrique "Décidément, il n'ont que ça à faire !", c'est tous les jours qu'on a droit à la dernière fournée de sondages concernant les élections municipales à... Paris, avec des choses comme ce qui suit, à croire que d'aucuns sont vraiment passés maîtres dans l'art de désinformer :


Et les sondologues, sondocrates, politologues et autres politocrates de se perdre en conjectures. Ça fait vendre du papier et accessoirement, ça donne du travail à une cohorte bien connue de consultants usant le fond de leurs pantalons et jupes de tailleur sur les fauteuils moelleux des studios de radio et de télévision.

Alors, on leur rappelle, à ces braves nigauds, le principe d'une élection municipale ?

En France, les maires ne sont pas élus au suffrage universel direct mais sont désignés par un collège de grands électeurs - les conseillers municipaux - à l'instar de tout premier ministre ou chancelier dans une république parlementaire (les députés, élus au suffrage universel direct, désignent ensuite le Premier ministre).

Par ailleurs, dans le(s) cas de Paris, Lyon, Marseille, villes découpées en arrondissements, les élections municipales sont "sectarisées" par arrondissements voire par secteurs susceptibles de regrouper plusieurs arrondissements, soit dix-sept circonscriptions parisiennes pour les vingt arrondissements, chaque circonscription envoyant un contingent défini d'élus siégeant au sein du Conseil de Paris.

Il s'ensuit - on enseigne cela aux élèves de collège dans le cadre de l'E.C.J.S. (Education Civique Juridique et Sociale) - qu'un camp peut être majoritaire en voix, tout en étant minoritaire en sièges au sein du Conseil de Paris, à l'instar de ce qui se produit parfois aux Etats-Unis, dans le cadre des élections présidentielles, où l'on a vu Hillary Clinton devancer Donald Trump de plusieurs millions de suffrages exprimés dans l'ensemble de l'électorat, tout en étant battue par le même Trump en termes de nombre de grands électeurs.

Et c'est exactement ce qui s'est produit à Paris, notamment en 2001, où les listes de droite (Philippe Séguin + le dissident Jean Tibéri) ont obtenu bien plus de voix que les listes menées par Bertrand Delanoë, le futur maire !

En clair, les sondages portant sur Tout-Paris, Tout-Lyon ou Tout-Marseille ne présentent aucun intérêt, à supposer qu'un sondage ait le moindre intérêt (scientifique) en matière électorale, dès lors que la Science ne fait pas de prévisions, se contentant de décrire la réalité ! (1)

Vous avez compris que ce type de sondage, c'était juste bon pour appâter les gogos ? (2)

Le comble c'est que ça semble (encore !) marcher...



(1) Par parenthèse, Archimède n'a jamais dit : "Je vais trouver !", ni "Je trouverai !", mais bien "J'ai trouvé !". La Science est, donc, de l'ordre de l'accompli, pas de la spéculation (hasardeuse) ! 

(2) Question : mais pourquoi diable nos experts en sondologie ne procèdent-ils pas à des enquêtes sectorielles (arrondissement par arrondissement), de manière à mieux cadrer avec la configuration électorale ? Euh, c'est-à-dire que... Vous avez vu les commanditaires desdits sondages ? Ils se mettent souvent à 3, 4, 5 organes de presse différents pour se partager les frais. C'est qu'un sondage par jour, voire par semaine, ça finit par faire très cher pour des médias low cost ! Alors, vous imaginez sonder secteur par secteur, soit dix-sept sondages à chaque fois pour Paris, vous n'y pensez pas ma bonne  dame !  


Liens : 01 - 02 - 03- 04 



jeudi 23 janvier 2020

Sémantique de la désinformation #24


Épisode n° 24. Où l'on reparle de l'"antisémitisme"

Cette fois, ça va être très bref.

Le hasard me mène tout récemment sur un forum sur lequel apparaît ce qui suit.


Ainsi, donc, le sieur Mohamed Sifaoui y est allé de son couplet sur l'"antisémitisme" (chez moi, les guillemets sont toujours de rigueur), mais pour dire quoi ?

Pour affirmer, haut et fort, que les (Arabes) Saoudiens sont des antisémites.

Et moi de penser : "décidément, con un jour, con toujours !"

Outre le fait, assez affligeant, s'agissant d'un sujet d'origine berbère, de dénier, pour lui-même, le fait d'appartenir à la famille sémitique - voyez ce que Malcolm X dit de l'autodénigrement chez les sujets sous domination coloniale - Sifaoui s'enfonce dans le ridicule en montrant à la face du monde que sa propension à la flagornerie n'a d'égale que son immense inculture académique, dès lors que pas un sujet détenant un niveau de culture universitaire moyen n'ignore la composition des peuples se réclamant du "sémitisme".

Bien évidemment, je me suis fendu d'un petit "tweet" à l'attention de ce pauvre type...



Citation :
« Parmi les esclaves afro-américains, Malcom X faisait la différence entre les “noirs domestiques” (house negroes) et les “noirs des camps” (field negroes). Les premiers vivaient sous le même toit que leur patron ; leur mentalité était plus esclavagiste que l’esclavagiste lui-même ; ils parlaient de “notre plantation”, de “notre maison” ; ils s’inquiétaient quand leur patron tombait malade ; si un incendie se déclarait, ils déployaient toute leur énergie pour l’éteindre. Les seconds étaient exploités dans des camps ; ils haïssaient leur patron ; quand leur patron tombait malade, ils priaient pour qu’il meure, si la demeure prenait feu, ils priaient encore pour que le vent souffle plus fort. Reproposant cette distinction pour les Etats-Unis des années 60, Malcom X distinguait ceux qui parlaient de “notre gouvernement” et ceux qui disaient simplement “le gouvernement”. “J’en ai même entendu un qui disait "nos astronautes, racontait-il. Mais ce noir est un noir complètement fou !” (Source)

On résume ? On pense ce qu'on veut de l'intégrisme rétrograde et totalitaire des Wahhabites saoudiens, mais de là à taxer le noyau même de la culture et de la civilisation (arabo)sémitique d'antisémitisme relève du plus pur crétinisme !
 


Liens : 01 - 02


vendredi 23 août 2019

Sémantique de la désinformation #13


Épisode §13. Mirage paradigmatique

Tout le monde sait ce qu'est un mirage ?  Il s'agit généralement d'un phénomène optique généré par des conditions particulières de topographie et de luminosité.

Quant à la notion de paradigme, en linguistique, elle se définit comme l'ensemble des unités d'un certain type apparaissant dans un même contexte et qui sont de ce fait dans un rapport d'opposition (1), de substituabilité (Source). C'est ainsi qu'on peut considérer qu'une phrase simple est constituée d'une séquence paradigmatique (suite de paradigmes) formée à partir d'un déterminant (article, adjectif possessif ou démonstratif...), d'un substantif précédé ou non d'un adjectif, d'un verbe suivi ou non d'un complément (d'objet, circonstanciel, etc.).

Prenons quelques phrases simples :
- le chien aboie
- l'avion se pose sur la piste
- le chat de ma voisine miaule toute la journée

La première phrase se présente sous la forme la plus simple, faite de trois termes appartenant respectivement à trois paradigmes : déterminant, substantif, verbe.

Dans la catégorie/le paradigme des déterminants, je peux fort bien substituer un élément par un autre, ex. article indéfini, adjectif possessif ou démonstratif, ce qui nous donnerait par exemple :
- un chien aboie
- mon chien aboie
- ce chien aboie 

Dans la catégorie des verbes, je peux substituer 'aboyer' par un autre 'verbe' (et uniquement un verbe !), ex. 'grogner' et l'on voit que ma phrase simple est faite d'éléments appartenant à trois catégories distinctes et non interchangeables, tandis qu'à l'intérieur d'une même catégorie, les éléments constitutifs sont, eux, parfaitement interchangeables.
- le chien grogne
- un chien grogne
- mon chien grogne, etc.

Ce qui précède vaut pour la syntaxe. Mais on peut faire la même démonstration avec la sémantique, en considérant, par exemple, les synonymes et les antonymes. Autant on peut échanger des synonymes, autant les antonymes s'excluent mutuellement.

Ainsi, une même couleur est claire ou sombre (antonymie) ; pas les deux ; de même qu'un bruit est atténué ou strident, pas les deux. Ainsi, on peut dire d'un cheval qu'il est rapide ou véloce (synonymie), mais il ne saurait être noir et alezan, de même qu'un boxeur ne saurait être grand et petit. En clair, les paradigmes tenant à la couleur (la robe) d'un cheval ou à la taille d'un personnage sont exclusifs les uns des autres.

Je rassure tout le monde : la suite va être beaucoup plus courte. Compte tenu de ce qui précède, tout le monde comprend le sens d'un énoncé du type : 

- Démêler le vrai du faux !

En clair, le verbe "démêler" signifie, au sens propre comme au sens figuré, séparer des éléments au départ "emmêlés", dont nous savons pertinemment qu'ils ne sont pas identiques (= appartiennent à des paradigmes distincts), ici ce qui est vrai, par opposition à ce qui est faux.

Cela étant posé, essayez maintenant de comprendre la signification du slogan qui suit, apparu dans le nouvel habillage de la chaîne publique d'information France Info :

Source

 À votre avis, dans le spot publicitaire ci-dessus, "vrai" et "info" sont des synonymes ou des antonymes, autrement dit, ils appartiennent à un même paradigme ou à des paradigmes distincts ?

Si l'on reprend la formule "démêler le vrai du faux", force est d'admettre qu'éblouis par je ne sais quel mirage ou quelle illusion d'optique, les communiquants de France Info ont estimé que vrai et info étaient des antonymes.

C.Q.F.D. (Ce qu'il fallait démontrer !)

Entre nous, vous n'êtes pas mort(e)s de rire ?



(1) C'est ici que je préciserais "d'opposition ou de substituabilité", selon la catégorie (le paradigme) concerné : si les termes entrent dans un même paradigme (et ici, il est surtout question de sémantique), ils sont substituables, dans le cas contraire, ils sont (potentiellement) en opposition. Et pourquoi précisé-je qu'il est surtout question de sémantique ? Parce que si, d'un point de vue syntaxique, on peut considérer que la couleur d'un objet entre dans le paradigme "couleur", on peut naturellement dire : une rose blanche ou une rose rouge (syntaxe/substitution), le sens profond des mots nous dit que la rose est soit blanche, soit rouge (sémantique/opposition), pas les deux !