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jeudi 6 juin 2019

6 juin 2019 : à propos d'un soixante-quinzième anniversaire


Dans notre rubrique "Memento"...

En ce 6 juin 2019, jour anniversaire du fameux D-Day (6 juin 1944), il va sans dire que nous allons avoir droit à la cohorte des cérémonies commémoratives officielles, où l'on fera profusion de déclarations enflammées du genre "plus jamais ça !", déclarations dont on se doute bien que leurs auteurs n'y croient pas trop eux-mêmes... Voyez les ventes d'armes et les guerres qu'on entretient ici ou là. Car la guerre, c'est bon pour le business !

Ajoutez à cela cette attitude particulièrement cynique consistant à passer sous silence le rôle décisif de l'Armée Rouge dans la défaite d'Hitler, et vous aurez une idée du sérieux à accorder aux cérémonies commémoratives évoquées plus haut.

Le fait est que - et je me surprends à radoter - la bataille qui a enclenché l'écroulement du nazisme n'a pas eu lieu sur les plages normandes en juin 1944 mais bien plus tôt (1941-1943), en territoire soviétique, notamment à Stalingrad.

Et, comme je l'ai déjà évoqué ici même (mais la pédagogie, c'est aussi une affaire de répétition, n'est-ce pas ?), les premières colonnes de soldats de la Wehrmacht, faits prisonniers, sont apparues en Union Soviétique et nulle part ailleurs.

Autre détail essentiel, généralement occulté par les (mauvais) historiens : la déroute d'Hitler sur le front russe n'est pas seulement militaire, mais essentiellement (géo)stratégique. En effet, l'Allemagne (privée de colonies, donc de matières premières essentielles) était à court de carburant, et c'est précisément pour mettre la main sur les champs pétrolifères du Caucase qu'Hitler viole le pacte signé avec Staline. Dès lors, la déroute sur le front russe fait que l'appareil militaro-industriel nazi en est réduit à produire du carburant de synthèse tiré du charbon (mais aussi du caoutchouc artificiel ; cf. le complexe industriel de IG-Farben à Auschwitz), ce dernier ne lui permettant que de couvrir la moitié de ses énormes besoins. C'est ainsi que, faute de carburant, les troupes nazies se sont retrouvées littéralement "encalminées" un peu partout, avec des chars et des camions plantés en rase campagne, sans parler des navires, des sous-marins et des avions ! 

Déjà cité sur ce blog, le grand-père d'une copine allemande, qui m'avouait, un jour, mezza voce : "Hätten wir nur genug Benzin gehabt, so hätte wohl der Krieg weitere zehn Jahre gedauert!" (Si seulement nous avions eu assez de carburant, la guerre aurait duré dix bonnes années de plus !)

Stalingrad, février 1943 - Reddition du Generalfeldmarschall Friedrich Paulus

Stalingrad - Soldats de la Wehrmacht faits prisonniers

Fantassin de l'Armée Rouge tenant en respect deux soldats de la Wehrmacht
  


Kaum zu glauben! Just incredible! À peine croyable ! Les Etats-Unis n'auraient eu aucun scrupule à soutenir le camp (quel qu'il fût) en position de perdre la guerre (... and that way let them kill as many as possible!).
Soit dit en passant, le problème, avec certains "historiens", c'est qu'ils ne travaillent pas toujours avec professionnalisme, ou alors manquent-ils simplement de courage. Le fait est que l'opinion que j'exprime plus haut se retrouve amplement partagée au sein même des Etats-Unis. Voyez ce qu'en pense le Moon of Alabama... 



D-Day And The Myth Of A U.S. Victory
Each D-Day anniversary the same question comes up. Who defeated Germany and its allies? The answer is, without any doubt, the Soviet Union. 
But after decades of western propaganda the claims that the U.S. defeated the Reich has taken over many minds. Polls show that such propaganda works. More than half of the French people now believe that the U.S. contributed the most to the defeat of Germany. (...) 
The U.S. lost 411.000 people due to World war II, Great Britain lost 450,000, Germany some 7 million and the Soviet Union more than 20 million.  
Many people think that the Soviet Union, now "the Russians", were always the bad guys and that Germany was a loyal ally during that war…

Le Jour J et le mythe d’une victoire américaine
À chaque anniversaire du jour J, la même question se pose. Qui a vaincu l'Allemagne et ses alliés ? La réponse est sans aucun doute l'Union soviétique. 
Mais après des décennies de propagande occidentale, l’affirmation selon laquelle ce sont les États-Unis qui ont vaincu le Reich a envahi de nombreux esprits. Les sondages montrent que cette propagande fonctionne toujours. Plus de la moitié des Français croient maintenant que ce sont les États-Unis qui ont le plus contribué à la défaite de l'Allemagne (nazie). (...)

Les États-Unis ont perdu 411 000 personnes lors de la Seconde Guerre mondiale ; la Grande-Bretagne en a perdues 450 000, l’Allemagne environ 7 millions et l’Union soviétique plus de 20 millions. 
Beaucoup de gens pensent que l'Union soviétique, on dit maintenant "les Russes", ont toujours été les méchants et que l'Allemagne a été un allié fidèle pendant cette guerre. 

Lectures : 01 - 02 - (Nota bene : même si je trouve B.V. souvent agaçant, je tiens à rester honnête, donc, je le cite volontiers...) - 03 - 04 - 05 - 06 - 07 - 08


jeudi 24 mai 2018

Cogitations vespérales à propos d'un pseudo-philosophe français


Je vais être franc : je n'avais pas prévu de pondre ce texte aujourd'hui. Il faut vous dire que j'ai là, juste derrière moi, un piano auquel je n'ai pas touché depuis..., une semaine, plus ? Quelle honte ! Quand je pense que vers mes huit ans, je déchiffrais - sans avoir reçu la moindre leçon de solfège - des chorals luthériens que je jouais sur un harmonium - du même modèle que celui d'Albert Schweitzer à Lambaréné - que mon père avait rapporté d'un séjour en Suisse !

Le fait est qu'à dix ans, j'étais un parfait autodidacte en matière de solfège et de musique d'église (cf. le fameux "tube" Eine feste Burg). C'est dire si, aujourd'hui, j'ai un peu honte...

Mais je suis bien décidé à jouer du piano ce soir ; sauf que mon attention a été provisoirement accaparée par un article paru sur un site en ligne, et dont j'extrais ce qui suit :

Citation :
Question : Dans Civilisation, Régis Debray convoque un géopoliticien inattendu en la personne de Paul Valéry qui en 1927 écrivait: “L’Europe aspire visiblement à être gouvernée par une commission américaine. Toute sa politique s’y dirige.” Qu’en pensez-vous, Alain Finkielkraut?
Alain Finkielkraut. Du point de vue géopolitique, ce qui s’impose d’abord à nous, c’est de ne pas tomber dans l’ingratitude et de reconnaître notre dette. J’ai appris en lisant Régis Debray qu’à la question “Quelle est selon vous la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne?”, 55% des Français répondaient “l’URSS” en 1945, et seulement 15% les Etats-Unis; en 2004, le même sondage donnait le résultat exactement inverse. Le soldat Ryan est passé par là, dit Régis Debray, ajoutant que le triomphe de Hollywood entretient l’amnésie.
Mais c’est une autre forme d’amnésie que de faire l’impasse sur le Débarquement, ce moment inouï où des soldats américains sont morts, à 10000 kilomètres de chez eux, pour libérer la France de l’occupation allemande. Et puis, chance inimaginable, nous avons bénéficié du plan Marshall. Tandis que, comme l’a écrit Gombrowicz, “la fin de la guerre n’a pas apporté la libération aux Polonais; dans cette triste Europe centrale, elle signifiait seulement l’échange d’une nuit contre une autre, des bourreaux de Hitler contre ceux de Staline”. (Source)
Fin de citation
Je me dois de signaler à ceux de mes lecteurs qui ne connaissent pas la France, que monsieur A. Finkielkraut y jouit d'un prestige considérable, enfin, auprès d'une certaine clique médiatique qui le prend pour un philosophe, la France comptant certainement plus de "philosophes" que le reste de la planète ! Le prestige de Finkielkraut l'a même amené à s'installer, il y a peu, dans un fauteuil de ce club du 3ème âge baptisé 'Académie Française'.

Et comme preuve que n'importe quel pseudo-intellectuel peut accéder à l'Académie Française, nous avons cette déclaration intempestive (cf. quelqu'un me pose une question et je réponds 'in petto', sans même prendre le temps de la réflexion...) sur les véritables artisans de la défaite nazie de 1945.

Reprenons : un sondage nous apprend que 55 % des sondés considèrent l'URSS comme principal acteur de la défaite des nazis (et non pas de l'Allemagne comme stupidement suggéré par la question, dès lors que de nombreux Allemands furent des adversaires acharnés du nazisme, à l'instar du futur chancellier Willy Brandt, qui n'a pas hésité à endosser l'uniforme norvégien pour faire la guerre aux armées de son propre pays.).

Et voilà que notre pseudo-philosophe, sans même prendre le temps de la réflexion, nous sort cette stupidité : "... c'est une autre forme d'amnésie que de faire l'impasse sur le débarquement...".

Mais où a-t-il vu que les Français faisaient l'impasse sur le débarquement normand ?

Où y a-t-il "amnésie" lorsque les sondés mentionnent (en 1945) les Etats-Unis, derrière l'URSS, certes, et néanmoins présents parmi les responsables de la défaite nazie ?

Il paraît, à en croire un autre sondage, plus récent, que les choses se seraient inversées, les Etats-Unis passant en tête des responsables de la défaite nazie...

Pour ma part, je ne carbure pas aux sondages. Cela étant, sondages ou pas, en quoi le rôle des Etats-Unis peut-il être réduit au seul débarquement normand, dès lors que 1) ledit débarquement a impliqué une multitude de pays (Canada, Australie...) et 2) la France n'a été qu'un des pays européens occupés par Hitler, une victoire sur Hitler en France ne supposant pas nécessairement la victoire sur le nazisme dans toute l'Europe occupée !

Le fait est que, longtemps avant ce débarquement de juin 1944, ceux qui infligèrent à Hitler sa première déroute d'envergure furent les Soviétiques, si l'on s'en tient à la simple chronologie, chose que n'importe quel collégien peut découvrir en se documentant un peu.

Par parenthèse, j'ai vingt ans et je me trouve en Allemagne, lorsque je croise la route d'une certaine Annette H., dont le grand-père m'apprend qu'il a servi comme jeune sous-officier dans la Wehrmacht, sous le commandement de Manfred Rommel. À la fin d'un week-end passé dans la Forêt Noire, je prends congé de la famille et c'est le grand-père qui me ramène en voiture à la gare. Et il en profite pour me livrer cette confidence qui me laisse pantois : "Hätten wir nur genug Benzin gehabt, so hätte der Krieg weitere zehn Jahre gedauert." (Si seulement nous avions eu assez de carburant, la guerre aurait duré une bonne décennie de plus.).

Vous avez compris ? Non ? Alors je vous explique : c'est en violant le pacte germano-soviétique qu'Hitler a signé son arrêt de mort.

Mais pourquoi diable Hitler viole-t-il le pacte de non-agression concocté avec Staline ? Tout simplement pour étendre le Reich sur ces immenses territoires slaves, dont Himmler a dit, un jour, que leur germanisation ne se ferait pas par la culture mais par le sang. Mais, avant toute chose, Hitler avait impérativement besoin de faire voler ses avions, circuler ses chars, ses navires de guerre..., et pour ça, il lui fallait du pétrole, matière première peu présente dans le sous-sol européen (sous occupation nazie, ne parlons pas des colonies, inaccessibles à cause du blocus maritime), sauf chez l'allié roumain ainsi que dans... les champs pétrolifères du Causase (soviétique).

Les ingénieurs nazis ont bien essayé - avec un certain succès - de produire du carburant synthétique tiré du charbon (une des missions assignées  au complexe industriel bâti par IG-Farben à Auschwitz, avec la production de caoutchouc artificiel), mais cette essence de synthèse ne pouvait couvrir que la moitié des énormes besoins de la machine militaire nazie. Il fallait, donc, trouver dare-dare d'autres approvisionnements en pétrole.

D'où l'invasion de l'URSS et les déroutes subséquentes, notamment à Stalingrad (1942-1943), soit plus d'un an avant le fameux débarquement normand.





Demandez à n'importe quel historien ou officier supérieur ce qui se serait passé si, d'aventure, Hitler était venu à bout de l'Armée Rouge et avait assis sa domination sur l'URSS : il n'y aurait jamais eu de débarquement allié en juin 44, ni en Normandie, ni ailleurs ! 

Vous voulez que je vous dise ? J'ai l'impression d'avoir perdu mon temps avec ce guignol inculte de Finkielkraut ; finalement, je crois que je ferais bien de me remettre au piano (en fait un synthétiseur fort versatile car capable de "singer" une multitude d'instruments) !



Vidé0 1   Vidéo 2   Vidéo 3   Vidéo 4   Vidéo 5   Vidéo 6 (et dire que E. G. ne lisait pas la musique, Django Reinhardt et Count Basie... non plus, d'ailleurs !)

À propos du titre "Cogitations vespérales" : le texte a été rédigé en toute fin d'après-midi, soit, chez les Catholiques et visiblement aussi les Orthodoxes, l'heure des vêpres. Et à ce sujet, comment résister à ce chef-d'oeuvre absolu de Sergueï Rachmaninov ? Nul besoin d'être croyant(e) pour avoir la chair de poule... Il faut dire que les choeurs 'a capella' de la liturgie orthodoxe, c'est quelque chose ! Mais je n'oublie pas la version 'catholique' de Claudio Monteverdi, avec ce grandiose... Ave Maris Stella !